Test HCFR : EARSONICS Grace HR, écouteurs

Test HCFR : EARSONICS Grace HR, écouteurs

Compte-rendu de Eric_dub

 

Écouteurs Earsonics Grace : un état de Grâce permanent ?

 

Les écouteurs Earsonics Grace, vaisseau amiral de très haut de gamme de la marque, devraient susciter la curiosité.
Commençons par l’aspect matériel – sans refaire le détail de la présentation très complète d’AJR.
La mise en œuvre ne m’a posé aucun problème : quelques essais pour choisir les embouts qui me conviennent ont suffi pour déterminer le meilleur accord. Je ne saurais trop insister sur cette phase, sans laquelle une écoute peut fort bien s’avérer totalement ratée et faire passer à côté des qualités réelles d’une paire d’écouteurs in-ear.
Rien de bien difficile ici, car la section des conduits est tout à fait standard et tous les embouts du commerce s’y adaptent sans problème : il ne reste qu’à utiliser ceux qui conviennent à la morphologie de l’auditeur.

Un mot sur le système : toutes les écoutes ont été faites sur un DAP portable iBasso DX50, même si j’ai aussi essayé de brancher les Grace sur la prise casque de mon smartphone ainsi que de mon ampli à tubes RKV.
Certes, dans ce dernier cas, il n’y a aucun problème pour obtenir une écoute, mais il n’en demeure pas moins que la qualité sera très dépendante de la qualité du smartphone et de son amplification (qui, curieusement, n’est pas du même niveau que mon RKV). Ça n’est pas catastrophique avec mon Sony — mais cela reste nettement en deçà de ce que l’on obtient avec un DAP dédié, même dans le cas de mon petit modèle, et aussi d’un ampli sédentaire.

 

 

Premier disque, donc, l’un des CD de l’intégrale des quatuors à cordes de Raymond Murray Schafer, réalisée par le Quatuor Molinari — un disque sorti chez Atma Classique en 2013 — et plus précisément le dixième quatuor, intitulé Winter Birds.
On me dira que c’est un choix contestable, car le quatuor contemporain n’est sans doute pas le genre de musique le plus populaire qui soit. Mais quoi de mieux qu’une pièce jouant sur les sons, les couleurs, les énergies et les contrastes, en utilisant l’une des formations instrumentales les plus traditionnelles — violons, alto, violoncelle — pour une écoute cherchant à évaluer le type de “signature” ou de restitution proposée?

Les Grace procurent une très belle image sonore, dont l’assise dans le grave, bien tenu et fort lisible renforce la crédibilité.
Le haut médium et l’aigu sont très aérés et offrent une belle impression de fluidité. Pour tout dire, cela me donne une impression fort proche de ce que j’obtiens avec mon Sennheiser HD800 — à moins que cela ne vienne de l’usage intensif que j’en ai fait récemment.
Une petite comparaison avec mes AKG N40 (dont le réglage de grave est sur “normal”) s’avère cruelle — pour ces intras, qui donnent un résultat aseptisé, peut-être légèrement voilé dans le haut médium et l’aigu, et dont les registres grave et bas médium sont un peu en retrait. Certes, la différence s’oublie en quelques instants, mais les Grace placent la musique quelques étages plus haut.

 

 

Le disque suivant, histoire de changer de genre, est celui du groupe Eagles, Hotel California — spécialement le titre éponyme — qui date de 1976.
Année de la sécheresse, certes, mais pas de la sécheresse musicale. J’ai utilisé pour cette écoute la version de 2017, qui équivaut au remix de 2013, et j’ai poussé l’écoute jusqu’au CD2 qui propose des pistes enregistrées en live.
Le registre grave est superbement tendu et présent, et la basse est frappante sans pour autant envahir le reste des instruments: basse, voix, guitare, tous les registres restent lisible et d’une netteté très réussie.
Une petite comparaison entre le DX50 et mon smartphone me montre que ce dernier peut certes servir de source. Mais l’avantage revient quand même au DAP, qui permet d’obtenir un volume et un niveau assez élevé — et ce, alors que j’écoute plutôt à volume moyen (voire bas, par moment).
La comparaison avec mes N40 donne la même impression de tassement général, d’une basse moins tendue, moins présente, d’une guitare moins brillante et plus feutrée (on peut certes monter le volume, pour tenter de rattraper l’effet, mais ça n’est pas le même résultat): avec les Grace, tout est percutant, mais sans aucune agressivité.
Évidemment, l’impression ne surgit qu’à la comparaison directe, mais la différence est très nette, heureusement, d’ailleurs, si l’on considère le tarif. Reste que le rendu de ces intras s’avère de très haut niveau.

 

 

Pour suivre, de l’ami Hubert Félix Thiéfaine, Homo Plebis Ulimæ Tour, album live sorti chez Columbia en 2012: un concert propre à ravir les amateurs d’HFT — dont je suis depuis que j’ai entendu, en 1978, un certain nombre de corps vivants s’émouvoir après s’être branchés sur le secteur.
Les Dingues et les paumés — sorte de variation sur les Paumés du petit matin du grand Jacques — dont le texte superbement écrit est à écouter avec soin (ou pas, ça dépend du moral dont on dispose!) donnent le ton général des écoutes dont les Grace sont capables: la superbe instrumentation et le chant proche du récitatif sont proposés avec énormément de présence, et pourtant beaucoup de transparence, les effets de salle et les réactions du public étant très distincts et donnant l’impression d’y “être”.
Cela me rappelle l’un des excellents concerts de cette tournée auquel j’avais pu assister. Pour une petite comparaison, j’ai ressorti mon HD650 — ce qui implique de monter le volume pour rattraper la moindre sensibilité du Sennheiser.
Comme attendu, le registre grave est nettement en retrait, mais du médium à l’aigu, il n’y a aucun effet de netteté ou de transparence supplémentaire en passant au casque: au contraire, le HD650 marque le pas et se trouve en retrait, en proposant un aigu moins clair et moins aérien, soit qu’il soit descendant dans cette région, soit que le Grace en fasse un peu plus, sans pourtant donner dans l’excès.

 

 

Je reviens à mes goûts les plus fixes (comme les idées du même nom), à savoir de la musique baroque — j’allais presque écrire “c’est-à-dire” — par Jordi Savall: Altre Follie, album sorti chez Aliavox en 2005, et principalement la plage 3, de Cabezõn, Pavano Con Su Glosa.
Cet enregistrement, avec quelques autres du même maître dans le même catalogue, m’a toujours paru exceptionnel, et, comme j’avais eu la chance d’entendre Savall en concert au moment où j’avais acheté ce disque et dans un programme en partie proche, j’avais pu avoir une sorte de confirmation de ce jugement.
La viole de gambe et les instruments sont criants de réalisme et je n’entends aucune coloration, la linéarité me semblant exceptionnelle aussi dans le bas médium.
Par curiosité, j’ai procédé à une petite comparaison avec mon HE6se en branchant alternativement celui-ci et les Grace sur mon RKV3 (il faut alors réellement jouer du potentiomètre!). Certes l’orthodynamique me semble passer devant dans l’ampleur de l’image sonore, probablement en raison d’une assise dans le grave plus ferme encore.
En revanche, la transparence et la fluidité sont dans les deux cas au rendez-vous, le HE6se me semblant plus clair dans le haut médium, et les Grace, plus présents dans le médium: on est au même niveau, les différences étant plutôt de l’ordre d’un écart dans la présentation de la musique, un peu comme quand on change de place au concert.
Donc, la réponse à la question que je n’ai pas posée est: oui, les intras peuvent décidément faire ça (ce qui était inimaginable il y a à peine quelques années).

 

 

Pour finir, j’ai ressorti l’intégrale des quatuors à cordes de John Adams enregistrée chez Attaca Records en 2013 par le Quatuor Attaca.
C’est avant tout le morceau Fellow Traveler — qui clôt le recueil — que j’apprécie dans l’interprétation proposée, qui en rend le côté plaisant et léger, en même temps que l’entrain (c’est le cas de le dire, même s’il s’agit plutôt d’un tramway).
Les Grace proposent un résultat sans restriction et sans défaut repérable, en tout cas par moi et l’écoute est même encore plus plaisante sur mon ampli à tube que sur mon DAP.
Les contrastes — et il y en a, la pièce faisant à la fois référence au parcours d’un tramway et aux communistes ou compagnons de route jadis pourchassés (fellow traveler) — sont superbement rendus, ainsi que les intonations et les attaques, le tout sans une once d’agressivité (ce qui n’est pas si courant qu’on pourrait le croire).
Une petite comparaison finale entre cette écoute et celle que propose mon Odin tend selon moi à montrer que le Kennerton arrondit les angles (ce qui vaut mieux que de les rendre coupants) dans le haut médium, là où les Grace donnent une très belle clarté dans ce registre tout en restant naturels et fluides, et qu’ils sont probablement plus neutres même s’ils procurent une moindre assise dans le grave.

 

 

 

Conclusion ?

 

Ce sont des intras chers, et même très chers.
Mais qui tiennent le pari de se mesurer à des casques sédentaires de tarifs comparables et même de leur en remontrer, indiquant par là qu’on les utilisera aussi bien à la maison (en trouvant l’ampli adapté, ce qui est loin d’être impossible : l’ADI-2 de chez RME devrait pouvoir faire merveille), qu’en balade avec un DAP de bon niveau, capable de lire tous les formats et d’embarquer des centaines de disques.

On peut saluer dans ce modèle un haut de gamme véritable, capable de provoquer un véritable état de grâce !

 

 

Eric_dub
HCFR – Avril 2021

 

– lien vers le sujet HCFR dédié au EARSONICS GRACE HR : https://www.homecinema-fr.com/forum/casques-haute-fidelite/earsonics-iem-made-in-france-tests-hcfr-post-1-t30059158.html

 

 

 

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