Fre.Mo a écrit:De la même façon pourquoi certains produits ont dès coefficients d’absorption (alpha S) supérieur a 1? Est ce que cela veut dire qu’ils absorbent plus de 100%?
Très bonne question.
D'abord alpha S n'est pas un coefficient.
Il existe deux méthodes de mesure de l'absorption des matériaux:
1- Celle ou on place une éprouvette dans un tube à impédance (ou tube de Kundt). Norme ISO-10534.
Elle donne directement le coefficient d'absorption compris entre 0 et 1, utilisable avec les formules de Sabine et Eyring.
Inconvénient: Pour produire une onde plane nécessaire à la mesure, le diamètre du tube est faible en regard de sa longueur. Sa taille ne permet de mesurer l'absorption d'un objet volumineux comme un fauteuil ou un basstrap par exemple.
Les valeurs obtenues sont exactes pour les ondes incidentes normales à la surface de l'échantillon mais elles reflètent moins bien le comportement dans les espaces réverbérants où l'angle d'incidence est aléatoire.
Cette méthode fiable n'est quasiment jamais employée pour les produits du commerce.
2- La mesure en chambre réverbérante. ISO-354
On pose une surface importante de matériau à tester (10 à 12m²), dans une chambre de 200m3 minimum où la réverbération est très longue (>10 secondes dans les graves). La présence du matériau réduit la réverb et par comparaison avec et sans, on peut déterminer les propriétés d'absorption du matériau ou du produit.
Sauf que:
- L'épaisseur acoustique de l'échantillon varie avec l'angle d'incidence. A 60° l'épaisseur parait double de celle à 0°. Donc les valeurs dans les graves seront 2 fois meilleures.
- Sur le périmètre de l'échantillon, l'impédance quasi-nulle du sol de la chambre contraste avec l'impédance relativement élevée de l'échantillon. Cela constitue une ligne de rupture d'impédance. Le long de cette ligne, l'absorption du matériau "bave" en quelque sorte au delà de sa limite. Ceci équivaut à une surface d'échantillon plus grande que la réalité. Ainsi, on obtient des valeurs supérieures à 1.
Attention, ces valeurs ne sont pas des coefficients d'absorption mais "l'aire d'absorption équivalente" en" mètres carrés sabine". Ils ne sont pas directement exploitables avec les formules de sabine ou d'Eyring. (Essayez de calculer le logarithme népérien de '1 - alpha' quand la valeur de alpha est supérieure à 1).
Il n'existe pas de formule de conversion entre les deux lectures.
Cette méthode, aux indices avantageux, est presque toujours celle employée pour les produits du commerce.
A cela s'ajoutent les astuces marketing. Si on pose 12 panneaux de laine de 1m² jointifs pour former un rectangle de 3 x 4m. La ligne de rupture (périmètre) mesure 14 m et on obtiendra par exemple un indice d'absorption de 1,2. Mais si on place les panneaux en damier, la ligne de rupture mesure 31m et l'indice peut monter à 2 et même au-delà !
On peut aussi décoller le matériau de la surface et mesurer l'influence du plénum (c'est le cas pour les dalles de plafond).
La norme spécifie plusieurs montages par des lettres de A à E. Mais la norme et le type de montage sont rarement indiqués sur la brochure commerciale du produit.
Enfin, il est rare que vous écoutiez vos films dans une chambre réverbérante. Dans une pièce un peu matte, la formule de Sabine ne s'applique plus et l'angle d'incidence prend une grande importance. Vos enceintes sont directives et cette directivité varie avec la fréquence.
De plus, vous arrosez une plus grande surface de murs dans les graves que les aigus. L'angle d'incidence sera très faible sur le mur arrière de la pièce et élevé sur les côtés.
En résumé, la surface absorption varie avec la fréquence, le coefficient d'absorption varie avec l'angle d'incidence, il diffère selon la méthode de mesure et il n'est pas directement utilisable avec les logiciels de calcul...
Cela n'empêche pas l'acheteur de se précipiter sur le produit dont l'indice est le plus ronflant, même si dès le premier coup d'oeil, la valeur est incompatible avec ses dimensions physiques.
Note: Pour les études que je mène, je tiens compte des angles d'incidence et de la méthode de mesure utilisée, ce qui me complique un peu la vie. Au besoin, je possède un tube à impédance avec lequel je fais des mesures comparatives. basées sur des échantillons de référence.