syber a écrit:La carte n'est pas le territoire. La photo n'est pas le paysage. Le portrait n'est pas la personne.
Oui, c'est ça. À quoi il faut ajouter que le portrait n'est pas la personne, mais que si le portrait est “bon”, on reconnaît la personne; et que si on confond le portrait, mettons, d'Emanuel Macron, avec le portrait de Louis XIV, c'est que le peintre est mauvais (ou que c'est un plaisantin, ou qu'on n'a jamais vu la toile de Rigaud).
Mais dans l'illusion de la présence réelle, il y a autre chose que la simple ressemblance: car si ressemblant que soit le portrait, on ne s'attend pas à ce qu'il parle — et de même on n'a guère l'idée d'aller se promener ni dans une carte ni dans une photographie. Quand on a l'impression que le portrait va parler ou qu'on peut se promener dans le paysage que l'on voit, alors que c'est une photo, c'est qu'on a affaire à une illusion. Car, la carte n'est pas faite pour tromper, mais pour se repérer; la photographie ou le portrait peuvent, de même, n'être pas faits pour tromper, mais pour “reconnaître”. Il y a, dans l'illusion, une volonté de tromper à ajouter à la ressemblance.
Les écoutes pratiquées jadis par Cabasse, qui faisait se succéder, derrière un rideau, les musiciens, puis la reproduction stéréophonique par un système hifi illustrent ça: il faut ne pas voir que c'est le système et non les musiciens qui joue(nt) pour pouvoir éprouver (ou non) l'illusion du réel. Et la hifi consiste à produire une illusion (puisque les musiciens ne sont jamais dans mon salon: j'habite pas assez grand!) qui soit telle que je n'arrive pas à la discerner du réel. Et pour savoir si l'illusion est une bonne illusion, il faudrait procéder à une expérience semblable pour savoir si la perception de l'illusion est indiscernable de la perception du réel (ce que l'on ne fait quasiment jamais).
Cdlt