» 16 Aoû 2014 13:07
Je n'ai aucun mal à croire que Miyazaki ait voulu faire de Ghibli un instrument à sa botte, quitte à saboter la relève. J'ai trouvé par exemple un peu étrange que l'on célèbre Le Vent se lève comme le film des adieux de Miyazaki (ce qui est probable, mais la promo pour son précédent ultime film, Le Voyage de Chihiro, mettait plus l'accent sur les qualités propres du film que sur le fait que ça serait son dernier), alors que quelques mois plus tard, Le Conte de la princesse Kaguya, qui est lui aussi certainement le dernier film d'Isao Takahata (78 ans, donc encore plus vieux que Miyazaki), n'est pas "vendu" avec ce même angle. Alors que j'ai largement préféré le Takahata, qui est visuellement un des films les plus somptueux que j'ai vus depuis des années.
Le succès de Ghibli aux USA (par opposition à un film ça et là comme dans les années 90) est en grande partie dû aux efforts des gens de Pixar. C'est John Lasseter qui avait produit le doublage du Voyage de Chihiro, ce qui a contribué à ce que le film remporte l'Oscar. Depuis, Ghibli et Disney avaient un deal, avec Disney qui est le premier studio contacté pour distribuer leurs films aux USA (ce qui a été le cas pour Le Vent, mais pas pour Le Conte, et encore à déterminer pour Souvenirs de Marnie). C'est aussi pour ça que Pixar avait eu le droit de montrer Totoro dans Toy Story 3.
Et, comme d'autres l'ont écrit ici, je crois qu'il faut se méfier de l'équivalence Miyazaki = Ghibli = animé de qualité. C'est certain que la retraite de Miyazaki est un coup dur pour le secteur, mais l'animation japonaise ne se réduisait pas à un seul individu, aussi brillant et inventif soit-il. C'est simplement la fin d'une époque, et si de nouveaux talents émergent, ils émergeront d'une autre façon au Japon, dans d'autres studios, avec d'autres outils.
En Occident, on ne fait plus non plus de films d'animation comme ceux des années 30, 50 ou 70. On a perdu des choses, mais aussi gagné d'autres. S'il y a vingt ans, on m'avait dit que Pixar allait complètement régénérer le secteur au moyen de l'animation en images de synthèse, mais surtout au travers de scénarios particulièrement fouillés et profonds, j'aurais été très sceptique. Si à la fin des années 80 (quand les producteurs de Roger Rabbit exigeaient de travailler en Angleterre tellement l'animation Disney était discréditée) ou au milieu des années 2000 (quand on célébrait Shrek comme l'antidote à la guimauve Disney...), certains avaient parié sur un retour en force de Disney, on leur aurait ri au nez.
Et pourtant, ces studios ont maintenant réussi à trouver des techniques pour transcrire la palette et le style de leurs films classiques dans des productions en images de synthèse (Raiponce, La Reine des neiges), et ont même rouvert une activité animation à la main qui a déjà fait quelques beaux trucs (La Princesse et la Grenouille, le Winnie l'ourson et surtout les courts où ils mêlent 2D et 3D).