Philippe Muller (ancien chef de produit Cabasse, puis consultant B&W) que vous connaissez sans doute de nom pour l'avoir probablement lu sur les forums, a rédigé ce billet sur son blog : http://philippemuller.unblog.fr/reprodu ... -fidelite/
Je vous le copie/colle :
Caisson de basses asservi ou pas
Après avoir été abandonné par presque tout le monde, l’asservissement est réapparu depuis peu et, à en croire certains, serait devenu la panacée sous prétexte que les technologies auraient évolué. Les modes ont la mémoire courte et le sens de l’observation mal aiguisé. Tous ceux qui défendent ce principe mélangent asservissement, filtrage, égalisation… Chaque fonction a un rôle défini et l’asservissement n’a rien à voir avec les autres fonctions. Surtout!!! il faut considérer le fonctionnement d’une enceinte dans son ensemble et non détail par détail. Une enceinte est un tout, ne l’oublions jamais. Ayant travaillé chez Cabasse, j’ai une certaine idée de ce que peuvent faire l’asservissement et la multipliamplification active (Cabasse créa la première enceinte active commerciale au monde, ce que beaucoup ont oublié). L’asservissement peut-être très intéressant pour des enceintes à trois voies avec médium dôme (les Brigantin, Galion et Sampan 3VTA étaient de grandes réussites) mais il devient problématique avec un système à quatre voies (Albatros et Goéland perdirent vite leur asservissement parce qu’ils étaient moins bons avec). Les constructeurs qui proposent de l’asservissement sur leurs caissons sont spécialisés dans le sub pour home-cinéma, pas pour la haute-fidélité. Tous les fabricants dont les subgraves sont censés accompagner des enceintes haute-fidélité se gardent bien de les équiper d’asservissement et ils savent très bien pourquoi. En tous cas, ce n’est pas parce qu’ils sont incapables d’en faire (c’est à la la portée de n’importe quel labo un peu compétent) mais simplement parce qu’ils savent très bien pourquoi il y a des limites au marketing. Si l’asservissement est tolérable pour la voie +1 d’un home-cinéma, parce qu’il est indépendant et ne se couple à aucune enceinte (il vit sa vie de façon indépendante), il se montre assez décevant quand il s’agit de le marier à une enceinte normale (dans le cas des canaux principaux). Associer deux haut-parleurs dont le comportement est très différent à la même fréquence (l’un est asservi, l’autre pas), n’a jamais donné de bons résultats. J’en sais quelque chose, car je possède encore deux paires d’Albatros dont l’asservissement mériterait d’être neutralisé pour reprendre du service. Pour information, un grave et un bas-médium, asservis tous les deux mais de façon indépendante, fonctionnent encore moins bien que deux haut-parleurs sans asservissement. Un bon asservissement devrait prendre en compte le couplage entre les deux voies pour que ça marche; ce serait parfait mais cela n’existe pas encore. Pour le moment, chaque haut-parleur joue dans son coin sans se préoccuper du voisin; comment voulez-vous que ça aille?
Pour posséder encore des enceintes à quatre voies dont deux sont asservies en vitesse et accélération (grave et bas-médium), je peux assurer que les mesures autour de la fréquence transition étaient souvent très accidentées, plus que dans la version active non asservie. François Bellec, ingénieur en chef de Cabasse, ex Supelec, m’expliquait que l’une des hypothèses de la grande difficulté de mise en oeuvre de l’asservissement peut provenir des modes de la pièce qui ne sont pas sans influences sur le comportement d’un haut-parleur, selon que ce haut-parleur se trouve placé dans un ventre ou un noeud acoustique (l’auditeur pouvant se retrouver dans une situation identique ou totalement opposée). L’asservissement réagissant à ce phénomène qui agit sur la membrane, des réactions très compliquées peuvent en résulter. Dans un ventre, l’asservissement réduit la voilure tandis qu’il met les voiles en présence d’un noeud car son rôle est de compenser les dysfonctionnement du haut-parleur. Ce phénomène apparaît notamment avec les bass-reflex dont l’asservissement s’accommode mal pour les mêmes raisons. Incontestablement, les enceintes asservies sont plus compliquées à positionner que les autres. Les nouveaux défenseurs du principe ignorent ou feignent d’ignorer cette situation particulière.
Il est aisé de mettre en évidence l’action des noeuds et ventres sur une enceinte asservie, une Albatros par exemple, en retirant simplement le tweeter (pour la mesure) afin de créer un bass-réflex provisoire. Il se trouve que dans ce cas précis, on obtient un accord situé vers 20Hz, lequel produit naturellement un noeud à cette fréquence au niveau du HP de basses. N’écoutant que son courage, l’asservissement augmente immédiatement la puissance à cette fréquence de manière considérable sans savoir qu’on retrouve un noeud à cette fréquence au niveau de l’évent. C’est ainsi que l’extrême-grave devient exagérément boursouflé. Si le phénomène inverse s’était produit, nous n’entendrions plus d’extrême-grave. Rien n’est aussi simple qu’on pourrait le croire. Le laboratoire des fabricants d’enceintes sérieux sont peuplés d’acousticiens, d’électroniciens, d’informaticiens… C’est le moins que l’on puisse faire pour maîtriser des choses aussi complexes.
Facile à réaliser de nos jours mais abandonné à l’unanimité par Cabasse qui s’en fit pourtant le chantre pendant de très nombreuses années, l’asservissement est défendu par très très peu de fabricants, sauf, peut-être des fabricants de caissons qui ne produisent rien d’autre. Et pourtant, cette technique est à la portée de n’importe quel laboratoire un tant soit peu compétent. Pourquoi cette désaffection? C’est tellement systématique qu’on est en droit de se poser la question. Finalement: l’asservissement est-il aussi recommandable et utile que les audiophiles semblent le croire?
De toutes les façons, l’asservissement est d’autant plus inutile dans un caisson que le volume y est si réduit que l’air contenu à l’intérieur est saturé en permanence. La puissance énorme des amplis intégrés suffit à compenser cette limitation. Finalement, il n’est pas facile d’y faire du traînage sauf avec un HP sans tenue (la taille de l’aimant ne prouve rien de ce côté-là). Ajoutons à cela, une lenteur confondante de l’extrême-grave en-dessous de 100Hz qui fait considérer l’évocation de la réponse impulsionnelle et de l’amortissement du caisson comme une blague de potache. Pas de doute, l’asservissement des caissons est bien une affaire de marketing pur qui me fait penser qu’à l’avenir, on trouvera sans doute quantité de caissons asservis dont le circuit sera quasiment inopérant (cette idée est libre de droits). Mais comme ça ne se verra pas et que personne ne l’entendra, cela fera au-moins le bonheur des marchands tout en gonflant d’orgueil l’audiophile en mal de nouveautés. Pour une fois, les deux parties y trouveront avantage.
… A bon entendeur.
En résumé, Ph. Muller rapporte une hypothèse émise par F. Bellec - chef du Labo de Cabasse dans les années 80 à l'époque des actives asservies du type Albatros - selon laquelle le comportement d'une membrane de HP serait affecté par les modes propres des locaux. En conséquence, un asservissement n'intégrant pas par conception la prise en compte de cette variable, peut rapidement donner un comportement erratique.
Ma question est simple, dénuée d'esprit polémique et soucieuse de permettre d'approfondir ou d'invalider ces notions !
Qu'en pensez-vous ?