Eh bien, pour ma part, fidèle à la devise de Pierre de Coubertin, j’ai choisi de participer plutôt que de m’abstenir ! Et je me suis dit que, s’agissant d’un produit nouveau et récent sur le marché, le retour d’expérience d’un « essuyeur de plâtres » paraitrait sûrement utile à ceux qui souhaitent s’épargner d’éventuelles galères et de nombreux échanges de courriels en anglais avec le support technique X-Rite Europe (par ailleurs compétent et serviable).
Pour entrer dans le vif du sujet et dissiper le doute qui s'immisce déjà dans certains esprits, je dirai d’emblée que l'i1Display Pro, successeur du réputé i1Display2, mérite certainement l’accueil favorable qui lui a été réservé. C'est un produit novateur et bien fini accompagné d'un logiciel déjà éprouvé bien que perfectible. Encore faut-il savoir, en l’absence de tout document d’accompagnement détaillé, déjouer quelques « petits » obstacles pour bien utiliser l’ensemble.
1 – Lors de l’installation de la suite logicielle i1Applications sous Windows XP SP3 (je n’ai pas mené de test sous Vista ou Seven), le message suivant est apparu sur mon moniteur : « l’application xritedev a rencontré un problème et doit fermer ». Bien qu’apparemment connu, d’X-Rite, ce bogue est peu et mal documenté sur le site américain. Il semble pourtant que l’avertissement puisse être ignoré sans conséquences, xrdd.exe n’étant pas utilisé par la sonde i1Display Pro mais par d’autres outils. Pour autant, l’affichage d’un message d’erreur inutile à chaque lancement de Windows finit par être légèrement crispant. Espérons qu’X-Rite règlera rapidement cette question avec sa prochaine version du pilote.
2 – La sonde étant un périphérique USB de type HID, on peut également s’étonner – sauf si l’on se fiche éperdument de ce qu’il y a sous le capot – de ne pas la voir nommément listée dans le Gestionnaire de périphérique de Windows. En fait – encore faut-il le savoir – une fois branchée, elle apparait de manière « anonyme » sous les dénominations : "Périphérique conforme aux Périphériques d’interface utilisateurs (HID)" et "Périphérique d’interface utilisateur USB".
3 – Pour réaliser un profil valable avec la sonde, il faut impérativement s’assurer que certaines conditions indispensables à son bon fonctionnement sont satisfaites. Et pourtant ces conditions ne sont pas spécifiées dans l’aide contextuelle ou dans le « tutoriel » vidéo (en anglais) ! Les voici donc :
> désactiver tout programme d’économie d’écran susceptible d’agir sur la luminosité en fonction de la lumière ambiante (par exemple l’Ecoview sur les écrans EIZO).
> régler le contraste de l’écran à sa valeur native (généralement 50%).
> désactiver tout réglage externe de la température de couleur et/ou laisser celle-ci à sa valeur native.
> vérifier que les réglages colorimétriques sur le panneau de contrôle de la carte graphique correspondent aux valeurs par défaut du constructeur ou, quand c’est possible, les désactiver.
> vérifier que le curseur de l’accélération matérielle est bien placé sur « complète » (sous XP, on le trouve dans : Propriétés de Affichage/Paramètres/Avancés/onglet « Dépannage »).
> désinstaller de l’ordinateur tout logiciel de calibration autre qu’X-Rite et vérifier qu’aucun « sélecteur de profils » n’est présent dans le répertoire « Démarrage » du menu Démarrer.
4 – Enfin, avant de lancer le processus de calibration proprement dit, il convient de régler finement i1Profiler pour éviter certains écueils. Or les « informations » dispensées sur le volet gauche de l’écran ne permettent pas, la plupart du temps, de déterminer les bons choix à faire. Voici ce que, à titre d’exemple et en fonction de mon environnement de travail, j’ai fini par considérer comme des paramètres optimaux :
> Point blanc à 5500°K
> Luminance entre 150 et 167cd/m2 (soit 35% environ de la capacité de mon écran)
> Contraste natif (soit, en règle générale, 50%)
> Cases « Flare Correct » et « Contrôle actif de l’éclairage ambiant » NON COCHÉES
> Paramètres du profil par défaut NON MODIFIÉS
> Mire de 220 patches (à mon sens, le meilleur compromis temps/qualité). Au delà, il n'y a pas réellement d'amélioration de la qualité des profils mais en revanche, la durée du processus de calibration s'allonge sensiblement.
> Case « régler la luminosité et le contraste manuellement » COCHÉE. Si le contraste et la température de couleur ont bien été réglés comme indiqué ci-dessus, seule la luminosité sera à ajuster sur l’écran au cours du processus de calibration.
D’expérience, je dirai que le réglage manuel de luminosité s’avère généralement plus efficace que le réglage auto (ADC) même sur un écran intégrant la norme DDC-CI, du fait qu’il existe sur la plupart des moniteurs des écarts de luminance plus ou moins prononcés entre différentes zones, le centre étant souvent plus lumineux que la périphérie : en adoptant pour la zone centrale mesurée par la sonde une valeur légèrement supérieure à celle proposée par i1Profiler, on rend donc la luminance moyenne de l’écran plus proche de la valeur-cible.
5 – Lorsque toutes les conditions évoquées ci-dessus sont réunies, on peut obtenir avec l’i1Display Pro des profils de qualité : étendue et neutralité de la gamme des gris, véracité des couleurs, reproductibilité des valeurs enregistrées grâce à la procédure de contrôle d’iProfiler. Mais pour en arriver là, il aura fallu ne ménager ni son temps ni sa patience, et revérifier un à un tous les paramètres si les profils obtenus paraissent trop sombres (cf. à ce sujet les témoignages d’internautes sur divers forums américains, notamment :
http://www.avsforum.com/avs-vb/showthre ... st20649122).
Une fois le système bien calé, on est naturellement conduit, pour tenter de se rapprocher de son idéal colorimétrique, à réaliser de nombreux profils différents en faisant varier les paramètres de base. Identifier ces profils par la suite peut s’avérer difficile si l’on s’en tient au nom suggéré par défaut. Aussi vaut-il mieux, avant de les enregistrer, les dénommer de manière plus descriptive (par exemple K5500_L120_CNatif.icm) d’autant qu’il n’existe, hélas - car c'est une lacune regrettable du logiciel, aucun moyen de les ouvrir après coup dans i1Profiler pour retrouver leurs caractéristiques.
Notons pour finir que si la calibration d’écrans graphiques (Eizo, Nec, LaCie ou Dell) est la vocation naturelle de la sonde i1Display Pro, celle de vidéoprojecteurs standards ou d'écrans d’ordinateurs portables me parait bien plus illusoire compte-tenu du caractère approximatif des réglages disponibles sur ces matériels (quand ils existent !). La polyvalence proclamée par X-Rite fait donc ici surtout figure d’argument marketing.
En conclusion, malgré le bogue du pilote et les lacunes du logiciel i1Profiler, l’ensemble i1Display Pro reste un produit recommandable qui tient ses promesses en termes de rapidité de fonctionnement et de qualité globale des profils générés. Pour autant, sa mise en œuvre reste délicate voire problématique en l’absence d’un vrai manuel d’utilisation complet et détaillé.