autrichon gris a écrit:MA question: pensez vous qu'il soit encore possible pour vous de découvrir un disque absolu, un disque qui vous fait dresser les poils, un disque universel, un disque qu'on n'hésite jamais à réécouter ?
Pour moi oui, même si l'avenir de la distribution musicale semble plonger dans le chaos.
J'aime beaucoup le concept du disque "symbole d'un genre", comme tu dis. Et j'en classe pas mal dans cette catégorie dans ma discothèque, pour parler du passé :
Tangerine Dream - Ricochet, pour la musique électronique des 70s (Avec Klaus Schulze, Ashra, et même Jean-Michel Jarre ou Vangelis dans un style plus populaire). On ne peut pas dire que ce fut révolutionnaire, car ils étaient déjà nombreux dans ce style. C'est plutôt un aboutissement.
Difficile de trouver UN album qui soit symbole de la new wave pop années 80, car il y en a des tonnes (Propaganda - A Secret Wish, Talk Talk - It's my Life, Depeche Mode - Some Great Reward...) ce qui du coup leur retire toute originalité, mais il y a bien un tube symbole du genre, au moins en France, qui fut très original : Visage - Fade to Grey, en 1980.
Un symbole indiscutable de tout un genre qui n'a pas vraiment de nom : Dead Can Dance - The Serpent's Egg. En fait, le genre a pris le nom du groupe. C'est le "genre Dead Can Dance". Et ça, c'était complètement original. Il y avait This Mortal Coil, Clan of Xymox, Cocteau Twins (sur le même label), ou encore Bel Canto, dans le même style à la même époque. Je ne vois pas trop de quoi ils se sont inspirés. On me cite parfois des trucs rock que je ne connais pas trop, comme Velvet Underground, ou Genesis, mais je trouve que c'est un genre complètement déconnecté du rock. Guitare et batterie, par exemple, n'y jouent aucun rôle.
Passé dans les années 90 j'ai plus de mal à trouver d'album symbolique. Dans tout le mouvement techno trance dont j'étais fan, c'était surtout des compilations ou des maxis vinyle. Je retiens Future Sound Of London - Lifeforms, bien que contrairement à ta définition, j'hésite à le réécouter aujourd'hui. C'était "l'intelligent techno", comme on disait. Il y avait aussi Autechre, Aphex Twin dans le même genre... Ce n'était pas tout à fait original, car cela dérivait vaguement du mouvement synthé des années 70. L'album de Future Sound Of London est très original, lui.
On cite toujours Kraftwerk comme symbole et influence majeure, pourtant, je trouve Kraftwerk totalement à part, et je ne voit guère d'artiste qui aient repris leur genre. Ils ont été samplés, ça oui, et plus souvent qu'à leur tour, mais suivis, j'aimerais bien le voir.
Début des 90s, j'écoutais le mouvement industriel. Musique violente et bruitiste. On ne peut pas dire qu'elle ait marqué l'histoire, mais je retiens comme symbole l'album Lustmord - Heresy. En fait, le genre étant complètement multiforme, difficile de trouver un symbole, mais Lustmord a l'avatage d'une part de n'avoir rien perdu de son intérêt, et d'autre part d'être totalement original. Ne ne connais aucun autre artiste qui ait repris son genre, quoiqu'on puisse le classer assez fidèlement comme "dark ambient". Si vous voulez jeter une oreille, le bon morceau de cet album est le dernier : Heresy Part VI.
Années 2000, il y a un certain style dont le symbole pourrait être Dark Sanctuary - De Lumière et d'Obscurité. Je ne sais pas trop comment le nommer. On parle souvent de style heavenly / etheral / beautiful voices, mais le problème, c'est que pas mal d'artistes, dont Dark Sanctuary, sont plus tournés vers l'enfer que vers le paradis

Elane - The Fire of Glenvore pourrait devenir un symbole de ce genre, qui sait ? J'ai déjà vu ce CD à un prix carrément indécent sur Amazon (plus de 80 euros). Et côté paradis, les albums de Trobar de Morte pourraient être de bons candidats aussi.
En ce moment, côté electro-pop, je suis souvent agréablement surpris par certaines nouveautés. Par exemple Blutengel - Schwarzes Eis, ou Closterkeller - Aurum. Je ne les citerais pas comme candidats à devenir symbole, car ils ne sont pas assez aboutis, et n'innovent pas vraiment. Ils se contentent d'apporter leur style à un genre déjà existant.
Et je découvre aussi tout un genre, la musique traditionnelle moyen-orientale, interprétée par exemple par l'Ham de Foc, ou Ross Daly.
Bref, je ne doute pas de découvrir encore bien des disques absolus. Le problème qui se pose n'est pas celui de la création ou de l'originalité. Je n'ai pas la moindre inquiétude de ce côté là. Le problème est celui de l'enregistrement et de la distribution. Parmi les trois derniers labels que j'ai cités, Prikosnovénie semble connaître de grandes difficultés. La distribution en magasin a totalement cessé, alors qu'ils étaient encore à plusieurs catalogues en 2008 , les tirages de CD sont tombés à 500 exemplaires (le dernier Stellamara) au lieu de 1000 à 2000. Projekt semble également paniquer et vient de nous proposer de participer à une chasse aux téléchargements illégaux en nous demandant de trouver et de faire retirer leurs albums de chez Megaupload ou Rapidshare...
La distribution semble tout-à-fait possible sur Internet. Dizzi Dulcimer par exemple vend ses propres CD (gravés !), et ils ont l'air d'avoir été enregistrés avec peu de moyens. Ce que je trouvais en écoutant des émissions spécialisés sur la FM associative dans les 90s, je le trouve aujourd'hui en suivant des liens Youtube. Ce que mon disquaire me faisait écouter, je l'explore sur MySpace après avoir récupéré des noms sur des sites Internet.
En revanche, sans label pour avancer les frais, comment vont faire les artistes pour s'enregistrer ? Côté mixage, à la limite, vu le massacre opéré par les professionnels, cela ne me dérange pas que ce soit fait à la maison sur un PC. Mais qui pourra se payer les microphones et les salles d'enregistrement ?