Themisto a écrit:wald a écrit:Themisto a écrit: Ce que je pense est, qu'on teste la capacité de l'auditeur à pouvoir identifier avec précision (sous la forme d'une seule variable, à sa discrétion) sa précédente écoute, et sa capacité de comparer deux souvenirs acoustiques (toujours sous cette prétendue forme d'une seule variable choisie).
je ne comprend pas cette histoire de variable que je trouve déconnectée de la pratique des ABX. Tout ça est bien plus simple et c'est effectivement d'une certaine manière résumable à la capacité à reproduire, non pas
une preuve , mais une sensation, ladite capacité de reproduction valant preuve.
Ben, l'histoire de "variable" vient du fait que le message initial est complexe (amplitude, durée, etc), que l'influence des éléments du système de reproduction l'est tout autant complexe (non linéaire), et que tout cela est lié (les fonctions mathématiques d'évolution des éléments constituants dépendent les unes des autres).
Themisto, à mon avis il y a quelque chose que tu n'as pas bien assimilé dans Heisenberg (qui t'a apparemment un peu traumatisé), et du coup ça fait de la confusion dans ton esprit
Alors, quand tu as un nouveau CD, est-ce que tu l'écoutes une première fois en ne faisant attention qu'à la hauteur des notes, puis une seconde fois en ne faisant attention qu'au rythme, et puis une troisième fois en n'écoutant que les paroles (d'ailleurs chacune de ces actions requiert un très grand nombre de variables, mais bon admettons) ?. Non : tu écoutes tout en même temps, tu écoutes la musique (enfin j'imagine).
Bon. Maintenant imaginons que tu as un processeur d'effets. Si tu changes la réverb, au bout d'un moment (assez court) tu vas l'entendre. Tu vas te dire, "ça a changé". La reverb ça change plein de variables à la fois, on est d'accord ? (et la réverb se paramétrise elle-même par plusieurs variables : délai, volume de l'effet, etc.). Et pourtant tu peux entendre la différence. Ca ne gêne pas qu'il y ait 50000 variables qui changent. Et si tu ne peux pas l'entendre c'est juste qu'on a rajouté très peu de reverb. Imaginons maintenant que l'on ait deux sources (les deux mêmes, mais l'une est connecté à un processeur d'effet et on rajoute de la réverb). On peut te demander si tu entends la différence (je n'ai même pas dit en aveugle). Tu es d'accord ? Et ben voilà c'est tout. Tu es capable d'entendre des différences faisant intervenir plein de variables.
Autre exemple : 2 interprétations de la sonate de Liszt. On a pas de processeur d'effet, on a les deux mêmes sources, mais l'une joue la version d'Hozowitz et l'autre la version de Argerich. Bon, tu vas les entendre les différences si on te passe un extrait de chaque. Tu pourras les différencier. Et pourtant il y a plein de différences. Encore plus de variables que tout à l'heure !!!
Là tu vas dire : oui, mais moi je veux dire que si on considère deux sources très proches avec beaucoup de variables mais toutes très peu différentes, alors à cause d'Heisenberg on ne pourra pas les différencier. OK. Admettons. On en pourra pas différencier ces deux sources qui sont très proches. Qui sont tellement proches que l'oreille humaine ne peut pas entendre de différence entre les deux. OK. Et alors ? Quel rapport avec les tests en aveugle ? Tu viens de faire l'hypothèse qu'il pouvait exister deux sources différentes dans les structure, mais si peu différentes que l'oreille humaine (et/ou les appareils de mesure) ne pourront pas faire la différence. OK. Ca existe. Mais ça pose quel problème exactement ? On a deux sources qu'on ne peut pas différencier. Donc elle sont indistinguables par l'oreille humaine. OK. Donc personne ne réussira un test ABX dessus. OK. Et c'est quoi le problème ?
Et sinon, pour en rajouter une couche sur Syber, si je peux m'exprimer ainsi, je propose que les thuriféraires des tests ABX, plutôt que de demander abruptement aux poètes enthousiastes et audiophiles que nous fûmes tous un jour "Oui mais, t'as testé en aveugle ?", générant ainsi moulte réactions épidermiquo-allergiques, demandent plutôt d'un ton doucereux, mais non moins sournois :
"Oui mais, t'as testé en égalisant les niveaux ?". Et là ça sera plus difficile aux poètes audiophiles de répondre "Oh, mais tu m'emmerdes avec tes niveaux, moi j'écoute à tous les niveaux, moi j'égalise pas, moi je suis un psychopathe de la hifi, moi je différencie tous les appareils juste avec mon feeling". Ca sera plus dur.
Et pour répondre à Hervé25, je ne vois pas en quoi faire une étude avec un seul cas serait une imposture intellectuelle. Moi ça m'intéresse de savoir que Pio peut faire la différence entre le 320 kbps et le FLAC. Même si c'était le seul à avoir réussi le test, ça m'intéresserait. Parce que Pio n'est pas un extraterrestre, c'est un être humain (quoique...). De même quand Carl Lewis a battu le record du 100 m, il était tout seul, ils étaient pas trente Carl Lewis a passer sous la barre des 10s à Tokyo en 1991. Et pourtant on a officiellement dit que le record du 100m était battu. C'est la différence entre une performance et une moyenne. On peut discuter de ce qui est le plus intéressant en hifi : savoir si en moyenne les gens font la différence entre la platine A et la platine B ou bien savoir si un audiophile entrainé arrive à faire la différence entre la platine A et la platine B. Ca dépend. Pour ma part, la moyenne des gens, dans ce cas, je m'en fiche. Et donc je vois le test ABX non pas comme une imposture intellectuelle, mais comme une façon d'homologuer (ou pas) une sorte de record.
Voilà : le test ABX est à la hifi ce que le chronomètre est au sprint : une manière d'homologuer la performance. C'est simple à comprendre ça ?
Non, c'est pas simple, y a Themisto qui va dire qu'avec le chronomètre on ne mesure qu'une seule variable et que c'est pour ça que ça marche.
Bon alors et ça :
le test ABX est à la hifi ce que la barre est au saut en hauteur, une manière d'homologuer la performance.Ca fait intervenir plein de variables ça, le saut en hauteur et la chute (ou pas) de la barre : le short du sauteur, la résistance de l'air, le style de son Fosbury, comment il prend son élan, si le short frotte ou pas, la turbulence de l'air, super compliqué, mais à la fin, soit la barre tombe, soit elle ne tombe pas.
C'est pareil pour les tests ABX : le type qui écoute, il écoute comme d'habitude quand il écoute de la musique, un peu plus concentré peut-être si c'est difficile, mais voilà il écoute avec toute la complexité que recouvre le terme "écouter". Et il va essayer de faire la différence. Il peut faire comme il veut : extraire des passages, se concentrer sur les aigus, ou sur les graves, ou bien avoir une écoute globalisante, ou une écoute de biais (tu fais semblant de ne pas te concentrer sur la musique pour te détendre, pour essayer de mieux entendre les différences : tu ruses avec la musique). Tu fais ce que tu veux, comme tu veux, tous les coups sont permis. La méditation, l'alcool, tu écoutes un aussi grand nombre ou un aussi petit nombre de variables que tu veux. A la fin on te demandera juste :
"Alors, là, ce qu'on écoute c'est A ou c'est B ?"
Et à ce moment-là tu es seul. Dans le noir de la confusion. Tu réécoutes X, tu réécoutes A, tu réécoutes B. Et on te redemandes :
"C'est bon ? Tu as trouvé ? X, c'est A ou B ?"
Tu essuies la sueur qui coule de ton front, tu va pour saisir ton verre de Whisky, tu le reposes. Et puis tu dis : "Tu peux me les repasser tous les trois s'il te plait, je voudrais réécouter un peu là, c'est un peu confus..."
C'est ça qui fait peur dans les tests ABX. La solitude et l'angoisse de l'inconnu. La peur du noir...