dub a écrit:Je peux aussi encore dire autre chose. Ou bien on prétend qu'on est du côté de la rationalité, des sciences, etc: mais alors, on fait un petit effort pour en parler avec un minimum de rigueur et de scientificité. Ou bien on dit que c'est inutile, mais alors, il ne s'agit que d'un bavardage, plus ou moins plaisant peut-être, mais sans aucune valeur et certainement pas qui puisse prétendre à quoi que ce soit de scientifique.
doucement...
le sujet à l'origine c'est les tests en aveugle de matériel hi-fi - ou pas hi-fi d'ailleurs -, test en aveugle de matériel.
Et bien on peut très bien faire ces tests en suivant une démarche scientifique sans avoir besoin de corpus ou de concepts compliqués. Il faut démystifier la science, ou plus exactement la démarche scientifique.
En gros, pour faire un peu de science, il suffit d'un objet d'étude, d'un appareil de mesure et d'une communauté de chercheurs prêts à travailler sur le même objet que vous pour confirmer ou infirmez vos résultats.
En hifi grand public, l'appareil de mesure le plus répandu c'est l'oreille de tout un chacun. Et c'est là où ça se complique car cette oreille étant reliée à un cerveau, elle n'est pas fiable et a souvent une préférence pour ce qui est doré ou ce qui coûte beaucoup d'argent ou ce qui a une réputation. Déception. La méthode scientifique se prend un coup dans l'aile. En plus on ne sait pas très bien quel sens "universel" accorder à ce que l'oreille "audiophile" "mesure" couramment : le fruité du medium ? La profondeur des basses ? l'étagement des plans sonores ?
Heuresement des petits malins ont donc réfléchi et trouvé à peu près la seule chose de scientifique que l'on puisse faire avec une paire d'oreille et des appareils hifi : prouver la différence entre deux appareils A et B. C'est pas terrible, mais bon, c'est mieux que rien. Pour ça il suffit que l'auditeur arrive à deviner correctement un assez grand nombre de fois si on lui fait écouter A ou B. Evidemment des précautions doivent être prises : si le volume de A est très bas et celui de B très fort, il sera facile de différencier les deux, mais on aura alors seulement prouvé que l'on peut différencier A quand il joue bas de B quand il joue fort. Ce qui n'est pas un exploit. On préfèrera égaliser les volumes pour pouvoir dire que l'on peut différencier A de B quand ils jouent à volume égal. Là c'est déjà beaucoup plus intéressant. On peut aussi faire autrement : mettre les volumes à 0 systématiquement et l'auditeur ajuste le volume comme il veut. Idem s'il veut réécouter X : on le lui propose à volume 0. Comme ça chacun joue avec le volume comme il veut.
Bref c'est tout bête, et les concepts scientifiques qui sont derrière ne sont que des statistiques assez élémentaires, mais c'est puissant. Comme quoi on peut faire de la science avec pas grand chose. Je trouve assez fabuleux de pouvoir affirmer que A et B sont des appareils différents à mon oreille (avec seulement 0.002 % de probabilité d'avoir réussi à les différencier par pure chance). Et s'ils sont différents à mon oreille, ils sont différents pour l'oreille humaine en général (sauf si l'expérimentateur a des oreilles bioniques). Disons que l'on peut formuler ainsi un test en aveugle réussi: "Il existe au moins un être humain qui a pu différencier A et B (avec 0.002 % de chance qu'il ait réussi par pur hasard)". C'est un beau résultat je trouve.
Et chacun peut ajouter sa pierre en trouvant des appareils différents.
Par contre personne n'a encore trouvé comment montrer la supériorité de deux appareils A et B, ni comment définir cette supériorité. Enfin si, un ensemble de mesures existent certes, qui caractérisent tout un tas de qualités des appareils, mais ces mesures ne permettent pas de caractériser la qualité "audiophile" d'un appareil. Bien malin par exemple qui pourrait, à la seule vue de courbes et de mesures d'une paire d'enceintes, deviner comment ces enceintes vont sonner. Mais bon, les mesures qui existent c'est déjà mieux que rien et ça permet déjà de détecter des appareil qui manifestement marcheront mal. C'est déjà bien.
D'où deux conclusions :
- On ne peut faire confiance ni à ses oreilles, ni à celles des autres, pour se faire un avis sur des appareils hifi si les différences deviennent un tant soit peu subtiles et si les appareils ne sont pas écoutés en aveugle. C'est tellement évident que l'on ne comprend pas pourquoi cette démarche n'est pas plus utilisée dans les magasins et auditoriums de hifi : quand on fait des écoutes, on écoute, disons le 3DLab puis le Marantz puis le Denon, puis le YBA. Et on revient au Marantz, on réécoute le 3DLAb, on hésite entre les deux, on réécoute l'un puis l'autre et on fini par se décider. Bon. Et bien on pourrait faire la même chose en remplaçant les noms par A, B, C, D. Et si on n'est pas satisfait le vendeur pourrait dire. Ah, attendez, je vais rajouter une autre source, celle-là elle enterre les 4 autres. Evidemment du coup on remélange tout, et on se retrouve avec A,B,C,D,E (il faut remélanger pour ne pas savoir que la source qui enterre tout c'est E). Et là on écoute, et on cherche la source que l'on préfère.
C'est pas compliqué, c'est presque pareil que dans la vie réelle. Il suffit d'un peu d'effort du vendeur qui a les moyens d'investir dans une petite boite ABX et de la rentabiliser (s'il choisit bien les appareils qu'il met en vente).
Mais comme aucun test n'est fait de cette manière (notamment dans les magazines), on est obligé de faire confiance à des oreilles et à des cerveaux forcément biaisés.
En fait je ne vois pas ce que l'on peut reprocher à des tests en aveugle. Ca serait la même chose que dans la vie courante sauf que la marque est cachée. "En aveugle".
SI je sais ce qu'on peut leur reprocher : c'est difficile à mettre en oeuvre. C'est pour ça que ça ne devrait pas être (quasi) uniquement des amateurs qui s'y collent parce qu'aucun professionnel (à quelques notables exceptions près) ne s'en donnent la peine. Si Diapason (par exemple) dans ses comparatifs mensuels d'appareils hifi, faisait ses tests en aveugle ça serait : 1) beaucoup plus fiable et 2) beaucoup plus intéressant 3) beaucoup plus drôle
Et si la hifi devenait drôle, ça ne serait pas un mal...