expertdoc a écrit:Oui et ce d'autant plus qu'on ne peut isoler, quel que soit le protocole, la partie auditive pure de ses autres connexions et interactions
Ceci, et l'argument de la multimodalité des sens de Frgirard, nous conduit à prendre comme établies et inamovibles les impressions d'écoute des auditeurs du test de Kiang relaté plus haut : sur deux cordons secteurs identiques et ordinaires, on obtient un résultat "bien, bien meilleur, vivant, une dynamique acerée, de la vitalité, une scène sonore plus aérée et ouvert, avec musicalité et présence."
Et ce sans aucunement modifier le système de reproduction.
D'accord. Que devons-nous faire, donc, pour obtenir un meilleur résultat ? On voit qu'utiliser une chaîne différente n'est pas nécessaire. La solution est donc de recourir à l'hypnose !
Personnellement, je préfère suivre la voie opposée, la même que celle dont nous parlait notre prof de musique au lycée, qui était amatrice de musique contemporaine. C'est une musique, nous disait-elle, qui n'est pas facile d'accès. On n'apprécie tout son sens qu'après plusieurs écoutes. Ce n'est qu'alors que l'on commence à percevoir sa beauté.
J'applique le même principe à la hifi : j'écoute attentivement, de plusieurs façons, le plus possible en aveugle, afin de mieux apprécier le son. C'est rarement une fin en soi, sauf si je veux écouter certains passages de Pete Namlook et Klaus Schulze, avec des mélodies dans l'extrême grave, mais cela me facilite la vie dans le choix du matériel à utiliser pour écouter de la musique : mieux je connais mon oreille, plus simples sont les choix à faire.
La multimodalité des sens ? Une fois qu'on l'a reconnue à l'oeuvre chez soi, on peut en faire abstraction, et profiter vraiment du son sur un système qu'on maîtrise.
Prenons l'exemple de cette illusion d'optique pour illustrer cela :
Les lignes droites apparaissent tordues. C'est la perception qu'on en a. Cette perception comprend l'environnement des lignes droites, et les lignes droites elles-mêmes, et produit une sensation qui intègre les deux.
Si on prend une règle, ou mieux, si on observe la figure sous un angle rasant, on peut vérifier que les lignes sont droites, contrairement à ce que l'on perçoit de face.
Après cela, on les perçoit toujours courbes, mais notre interprétation a changé. Avec l'habitude, on finit par ne plus les interprèter comme des lignes "tordues", mais comme des lignes "dont l'environnement ne nous permet pas de juger de leur rectitude".
La perception du son semble un peu différente. Le processus perception / changement de l'environnement (mise en double aveugle = examen sous angle rasant) / changement d'habitudes est le même.
Mais contrairement aux illusions d'optique, la perception du son elle-même peut être modifiée, pas seulement son interprétation consciente. Dans des conditions parfaitement identiques, je n'ai plus entendu, en les ressortant du carton après 3 ans, les timbres abominables que j'avais perçus sur les câbles de modulation Mi-330 de MIT. En revanche, je vois toujours les lignes tordues sur la figure. La perception de l'image est restée la même, seule l'interprétation a changé.
En audio, l'un des plus grand progrès que les écoutes en aveugles m'aient amenés, c'est de ne plus avoir de frustration parce que le son n'est pas le même du jour au lendemain. Avant cela, je pouvais pester des jours contre la qualité déplorable du courant secteur en cette saison, ou contre la médiocrité insupportable du son de mon ampli parce qu'il n'a pas eu ses 800 heures de stabilisation après qu'un imbécile l'ait éteint 5 minutes sans mon autorisation.
Mais si on part du principe qu'on est impuissants, esclaves de ses sens, que leur multimodalité est figée et stable, qu'on est incapables de ne jamais apprendre quoi que ce soit en matière d'attention et d'écoute, alors en effet, continuer à acheter toujours plus est une solution, puisqu'il est prouvé que plus un placebo est cher, plus il a d'effet !
On en vient à la position de Francis Ibre, avec qui j'ai pu échanger quelques mots sur le forum CinEtSon, et qui est bien celle qui me fait le plus horreur :
ne pas penser. Selon lui, toute réflexion inhibe l'émotion musicale.
Il veut certainement dire quelque chose dont le sens m'échappe un peu, je le reconnais, mais je ne peux pas m'empècher de penser que cela veut aussi dire que "plus on est cons, meilleur est le son".