» 07 Mai 2009 17:40
Puisque, désormais, vous avez en main les clefs du calcul (je vous ai laissé le temps de digérer tout cela), nous allons pouvoir commencer à débattre des conséquences, parfois inattendues, de l’influence des parois.
En préambule, je dois vous dire que, durant mes études, j’ai été sensibilisé à la notion d’artefact dans la mesure des paramètres physiologiques destinés au diagnostic médical. Les artefacts représentent tout ce qui peut fausser les mesures et invalider un résultat qui, pourtant, apparaît clairement sur les écrans de contrôle.
Et bien, je suis convaincu que la méconnaissance (ou la connaissance partielle) des phénomènes décrits par Allison représente une forme très pernicieuse d’artefact pour certaines opinions qui ont cours dans les milieux audiophiles.
Commençons par un élément anecdotique mais révélateur de la notion d'artefact. Nous avons, tous, pu constater que le fait de placer des spikes sous les enceintes apporte des résultats variables, parfois positifs, parfois négatifs. On peut imaginer, à ce propos, toutes sortes de théories au niveau du couplage et de l’amortissement. C’est clairement un sujet que je ne souhaite pas aborder pour la bonne et simple raison que j’ai, en la matière, bien plus de questions que de réponses. Cependant, avant toute analyse, nous devons bien prendre conscience du fait que le premier effet des spikes est … de surélever l’enceinte de 2 à 5 cm selon la longueur des pointes. La distance entre le woofer et le sol varie d’autant. Dès lors, la zone fréquentielle qui bénéficie d’un renforcement par l’effet de paroi proche est très légèrement modifiée et, surtout, la zone du creux autour de 0.35 X (344* / d) varie aussi en fréquence. Bien que la sensibilité de notre oreille aux bosses et aux creux de la courbe de réponse soit, généralement, très sous-estimée, ces petites variations sont parfaitement audibles. Ainsi, lorsque vous voulez juger de l’effet des spikes, pour être sûr que les différences perçues sont bien dues à des questions d’amortissement et de couplage, vous devez, pour l’écoute sans spikes, surélever l’enceinte d’une valeur égale à la longueur des pointes (à l’aide d’une planche ou de morceaux de bois).
Beaucoup plus important est, à mes yeux, l’artefact de l’effet des parois proches sur l’impact subjectif que l’on attribue au poids des membranes. Comme je l’ai déjà dit, je ne souhaite pas, pour l’instant, aborder la question de fond. Je compte bien, dans quelque temps, ouvrir un sujet spécifique sur ce thème. Ce qui m’intéresse, ici, est de vous sensibiliser au fait que l’influence des parois peut biaiser complètement le débat.
Je vais partir d’une expérience vécue, il y a pas mal d'années. Une de mes connaissances avait acquis une paire de caissons Onken équipés d’Altec 416-8C. Dans sa pièce d’écoute, le grave était lourd et empâté et le résultat était, tout bonnement catastrophique. Appelé à la rescousse, j’avoue qu’il me fallut un certain temps pour trouver la solution. Et bien, vous aurez peut-être du mal à le croire, mais tout le problème venait de la parfaite linéarité du caisson Onken dans l’extrême grave. Aidé par l’important volume de la caisse et par la grande surface d'évents, celui-ci est, capable de fournir, jusqu’à la fréquence de coupure basse située un peu en dessous de 40Hz, une énergie sonore inhabituelle, dépourvue de la moindre atténuation. Ceux qui croient, sur parole, la communication bien huilée des documents publicitaires ne verront, en la matière, aucun exploit particulier mais je puis vous assurer que bien peu d’enceintes sont capables d’en faire autant. A première vue, rien que de réjouissant, donc. L’ennui, c’est que, pour les très basses fréquences, une paroi située à 80 cm voire à 1 m ou même 1.20 m du HP peut toujours être considérée comme proche. A ces distances du sol, du mur arrière et du mur latéral, le HP peut encore être considéré comme positionné en encoignure et le renforcement aux plus basses fréquences peut atteindre 9 dB. Lorsque le déficit d'énergie en infra grave à la sortie d'un traditionnel petit tuyau de bass reflex compense ce renforcement, le grave peut apparaître "rapide" et équilibré. A l'inverse, si le HP descend réellement dans l'extrême grave comme dans le cas d'un HP à membrane très lourde (en enceinte close et suspension acoustique) ou dans celui des caissons à grande surface d'évent, du style Onken, le son paraîtra lourd en raison du gonflement de de l'extrême grave par les parois proches. Dans le cas de l'exemple cité, il m'a suffi de réduire la surface d'évent et d'abaisser la fréquence d'accord du bass reflex. Ainsi l'énergie émise entre 70 et 40Hz se trouvait nettement diminuée tandis que la réponse se voyait étendue, en pente douce, jusqu'aux alentours de 25Hz. Nous avons, aussitôt, retrouvé un grave léger, profond et dynamique. La membrane s'était-elle allégée d'un gramme pour autant ? Non, bien sûr… Comme quoi, même si l'analogie "membrane lourde = son lourd" est bien tentante, il faut toujours se méfier des images un peu faciles et trop simplement suggestives !