» 31 Jan 2008 19:51
Justement ce qui m'inquiète plus c'est les conséquences sur la rétine, mais à long terme. Rien que sur le court terme, de simples pointeurs lasers de poche destinés à montrer les constellations dans le ciel sont déjà soumis à réglementation, à cause du trafic aérien (des pilotes auraient été affectés par ces lasers). De même si on reprend l'historique des chirurgies au laser de la cornée, on s'aperçoit qu'au début les risques de cécité pendant et après opération étaient bien réels.
Je connais bien ce dernier aspect pour avoir exercé comme opticien, et d'ailleurs je ne suis pas prêt de me faire opérer au laser. A l'origine, il était question de n'opérer que des personnages âgées, tout simplement parce qu'on n'avait aucun recul sur cette technologie, et qu'en cas de problème à terme, il "valait mieux" que ce soient des personnes qui "auraient moins besoin" de leur vue qui soient affectées que de jeunes actifs. Or quand un marché connaît un énorme potentiel et qu'il n'est pas exploité, on trouve inévitablement des petits malins qui contournent les obstacles juridiques pour pouvoir y pénétrer. C’est ainsi que les opérations laser ont pullulé, alors même qu'on ne sait toujours pas à l'heure actuelle quelles seront les conséquences dans une dizaine ou vingtaine d'années. A titre d'exemple, les premiers sujets opérés au laser ont subit une perte de vision environ un mois après l'opération, parfois jusqu’à cécité complète pendant trois mois. Ce phénomène a été étudié et on nomme ce voile le "haze". Cependant, personne n'avait été en mesure d'en anticiper l'existence avant opération (encore moins les conditions d'apparition), et pour cause, à moindre d'être devin. En partant de ce principe, comment pourrait -on affirmer sans détour que d'autres phénomènes analogues (ou non d'ailleurs) ne risquent pas d'apparaître avec le temps?
Le pire c'est qu'en principe, on devrait pouvoir compter sur les médecins, en l'occurrence les ophtalmos, pour tirer la sonnette d'alarme ou tout au moins tempérer cet engouement, éthique oblige, mais en pratique il faut bien amortir l'acquisition d'un tel équipement, que l'ophtalmo lambda se doit d'acquérir puisque ses concurrents projettent de le faire quand ils n'en ont pas déjà (question de pseudo-crédibilité : ça fait plus compétent d'être mieux équipé). Résultat j'ai même vu des ophtalmos venir en magasin pour me proposer personnellement une opération! Sachant que du point de vue déontologique une opération chirurgicale est un acte qui ne doit être prescrit qu'en cas de nécessité, ça en dit long... Bien évidemment ce n’est pas une généralité mais la proportion concernée est hélas loin d’être négligeable, d’ailleurs il n’était pas rare qu’un client m’en parle ; l’un d’eux m’avait montré une fois toute une décharge à signer, incluant risques de cécité et même... de décès (ça reste une opération).
Pour autant que je sache la situation n'a pas tellement évolué, ce qui n’est pas très étonnant vu que chaque cas reste à l'appréciation du médecin... mais cette réalité s'étend sur 20 ans, soit depuis qu'on opère au laser. Les études officielles concernant les tout premiers opérés devraient donc voir le jour sous peu, et on saura alors quelle aura été l'ampleur des risques que des médecins ont pris sciemment pendant tout ce temps.
Pour conclure, si je me permets ce petit hs ce n'est pas pour dire "attention, les projos lasers vont vous tuer les yeux". Les technologies évoluent, les connaissances aussi, et le marché du laser dans le domaine vidéo présente un potentiel si énorme qu'on peut supposer que tout sera mis en oeuvre pour proposer des appareils sans risque, car le moindre incident pourrait lui être fatal (comme il pourrait l'être "accessoirement" au consommateur). Mais le problème reste entier : nouvelles technologies, nouveaux risques, et dans un même domaine on ne saurait pourtant comparer sans recul les incidences à long terme d'une chirurgie de quelques secondes au laser et celles de X heures de projection laser... C'est un peu comme pour les téléphones portables et les risques non établis de cancer liés à leur proximité. A moins que tout ceci passe inaperçu suffisamment longtemps : après tout on parle d'une technologie naissante, or pour qu'un médecin auscultant un patient atteint d'un trouble oculaire pense à lui demander "vous avez un projecteur laser?" il faudrait qu'elle soit démocratisée, soit implémentée depuis un bail... Autrement dit, le consommateur pourrait être soumis à un risque.