Encore un autre débat, et là je ne suis pas du tout d'accord. Les 4/5èmes de la musique populaire occidentale de valeur au 20ème siècle ont été produits par des gens qui ont fait de la musique avant tout pour gagner de l'argent. S'ils n'avaient pas eu l'espoir de gagner de la thune, ils auraient fait autre chose. Ou alors, tu rayes de la carte pratiquement toute la musique afro-américaine, des jazzmen du début du siècle au hip-hop de la fin. Et du coup, tu rayes aussi presque toute la musique populaire blanche, d'Elvis à Tom Waits. C'est l'anecdote célèbre (et certainement inventée) de ce pirate célèbre (Sir Francis Drake ?) à qui l'amiral anglais qui l'avait capturé disait : "vous êtes une honte, vous ne vous battez que pour l'argent, tandis que nous combattons pour l'honneur !". Auquel le pirate aurait répondu : "Amiral, on se bat toujours pour ce que l'on n'a pas !".deep a écrit: Enfin une minorité fait de la musique par pur plaisir et la réussite financière n'est qu'accessoire, n'oublions pas que la musique est un art avant d'être une industrie! Ce qui prime dans tout domaine artistique c'est la reconnaissance du talent, le mercenariat ne donne bien souvent lieu qu'à des daubes! Certaines personnes veulent ainsi donc être reconnues!
Pour pouvoir mépriser l'argent, il faut en avoir suffisamment. Quand à tous les grands artistes noirs qui ont été spoliés par leurs labels (des petits labels, en plus, les majors n'existaient même pas), ben la "reconnaissance", ils s'en battaient bien les roubignolles. Ca te fait une belle jambe d'être dans les encyclopédies musicales quand tu crèves la dalle.
Tiens, tu as peut-être déjà entendu B.B. King raconter l'origine de sa vocation pour le blues ? Il chantait dans la rue du blues et du gospel. Il a remarqué très vite que les amateurs de gospel le félicitaient pour son talent et l'encourageaient à continuer. Tandis que les amateurs de blues le complimentaient peu mais étaient moins radins et lui filaient toujours une pièce. Il a vite choisi quelle musique il "préférait".
Je gagne environ 2000 €, ce qui n'a rien d'extravagant au bout de 29 ans de boulot, mais ça me suffit amplement pour m'acheter des tas de disques, surtout au prix où ils sont maintenant grâce à la concurrence du net. La faiblesse des ressources des consommateurs... euh... lesquels ? Les RMIstes ? Eux n'ont pas d'ordinateur et de connexion au net, et de toute façon ils se contrefichent des jeunes talents auto-produits, ils ont bien d'autres problèmes. Si on parle de la majorité des Français, je n'ai pas l'impression en voyant le nombre de voitures dans les rues que 15 € par mois soit une si grande somme pour la plupart (incidemment, j'ai une carte Orange, ça me fait économiser bien plus de 15 € par mois). On peut aller voir des chiffres sur le site de l'INSEE, note bien. Reste les étudiants, dont certains sont parfois d'éternels insatisfaits, qui voudraient tout pour rien, tout en ayant la flemme d'utiliser toutes les structures culturelles mises à disposition de tous (les médiathèques, par exemple). Pas d'amalgames faciles sur le dos des "pauvres", pitié ! La musique en tant que produit de consommation est tout en bas sur la liste des besoins. Et elle est devenue un produit de consommation depuis que les gens aux environs de l'entre-deux guerres ont commencé à cesser d'en faire eux-mêmes et ont commencé à acheter celle des autres. Avant, on se distrayait soi-même, on ne payait pas des gens pour ça. Et depuis les années 50, ça a encore fait un bond, avec les 30 glorieuses et l'expansion inimaginable du pouvoir d'achat. Et encore un autre bond avec le net et toutes ces radios du monde entier, le P2P, les sites où l'on peut écouter en ligne etc.Sur un autre terrain, n'oublie jamais que tes 15euros par mois c'est très précieux pour certaines personnes, je ne connais pas la mesure de tes revenus, mais l'argent ne coule pas à profusion pour tous ici! Les consommateurs sont quand même pris pour de bonnes vaches à lait en dépit de la faiblesse de leurs ressources ...
Or on remarque quand même que plus il y a de "culture" disponible et quasi-gratuite à portée de tous, plus le schisme s'accroît entre "passionnés" qui prêchent pour leur chapelle et en veulent encore plus, et les autres, la grande majorité, qui n'a ni le temps ni l'envie de se dédier à ce qui est peu connu et demande des efforts pour être découvert et apprécié. Et on est tous à plusieurs titres dans cette dernière catégorie, bien sûr. Pour un amateur de théâtre auquel je dirais que je n'ai guère vu que "Le Père Noël est une ordure" et 2 ou 3 autres bricoles à l'époque du lycée, je passerais pour un gros beauf abruti par la télé. Effectivement, je me contrefiche des efforts des petites troupes qui cherchent à monter des pièces intéressantes dans l'indifférence générale. Je compatis, c'est sûr, mais de là à m'y intéresser... On n'est plus depuis des décennies dans l'équation musique = art = culture. La musique est un produit, que ce soit un jeune auteur-compositeur torturé auto-produit ou une star frivole chez une major. l'auto-produit ne se vendra pas plus qu'avant s'il coûte 5 € de moins que le produit de la major. Quand tu achètes 1 disque par mois, ce qui doit être à tout casser la moyenne nationale, tu veux le truc dont tu as envie, tu te fiches des 5 € de différence.
Quand on voit que les lecteurs de la NRDS, pourtant majoritairement très aisés achète en moyenne 3 disques par mois, ça laisse rêveur sur l'influence du prix du disque. Tiens, on retombe sur mes 15 € : 3 disques à 5 € moins cher. Pour des gens qui disent par ailleurs dépenser dans les 1700 € par an en moyenne en matos hifi, tu n'arriveras pas à me convaincre que 15 € par mois font une différence pour eux