La vie de Poulidor
titre original : Livet av Poulidor (1983)
film couleur. Suède. Drame. durée : 1 h 35 mn
Réalisé par Olaf Stromberg avec Raymond Poulidor, d'autres cyclistes.
Résumé : Poulidor, un cycliste, participe à de nombreuses courses. Malgré un talent indéniable, il doit se résoudre à finir deuxième. Toujours deuxième.
Olaf Stromberg utilise le microcosme cycliste pour nous faire prendre conscience de l'ordre du monde. Se résoudre, se résoudre. Tel semble être le crédo humain. Malgré les efforts, malgré les astuces (scène mythique où l'équipe prend un pot) le résultat est intangible : deuxième.
La force du réalisateur réside dans son aptitude à esquisser le "un" sans jamais l'évoquer. Le véritable gagnant de l'étape sert uniquement à mettre en valeur l'effort de Poulidor. Montée, descente. Le scénario suit au millimètre la logique de chaque vie. La victoire se dérobe mais le héros se remet en selle, inlassablement.
Le phénomène d'identification est subtil. Le combat de Poulidor, ses souffrances sont notre combat, nos souffrances. Jamais un film n'aura abordé avec autant de sincérité et de fatalisme la condition humaine.
C'est la raison pour laquelle on a souvent comparé La Vie de Poulidor à Citizen Kane. Le RoseBud de l'un est le jaune du maillot de l'autre.
Le rêve inachevé, l'aventure sans cesse renouvelée. La victoire qui glisse entre les mains comme pour démontrer l'inexorabilité de l'existence et sa fatuité. Ode à l'amitié lorsque le journaliste, complice de son propre sort murmure un enjoué "va z-y poupou !".
Et Poupou y va. Et Poupou frôle succès.
Et le reste de l'humanité applaudit. Mais lui, Poupou, il sait que le "un" lui est inaccessible. Et il ne s'y résout jamais
* élu deuxième meilleur film de tous les temps dans la liste de l'American Institut.
Ajout du 28.08.2011
Olaf aurait récemment dîné en compagnie de Poupou. Lors du repas, trois cents convives présents se sont levés et lui ont, à sa grande surprise, offert une standing ovation. Il aurait alors, ému, pris la parole pour bredouiller des remerciements. Son étonnement faisait plaisir à voir. Olaf, selon les témoins de la scène, lui aurait glissé quelques mots à l'oreille et Poupou aurait tendu son verre vers l'assemblée avec un clin d'oeil complice.
l'affiche originale suédoise
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Films (débats, critiques), personnalités (acteurs, réalisateurs), prochaines sorties, les salles, la presse spécialisée...
L'Intention (1967)
Mai 1967. Olaf Stromberg a 19 ans lorsqu'il quitte, diplôme papier en poche, le Kinema Institut de Stockholm. Le long métrage réalisé à l’école (L’œuf) lui vaut déjà une fragile réputation.
Son film est tantôt adulé, tantôt conspué. Il ne dit rien mais il en souffre.
Il en profite pour approfondir sa connaissance sur le sentiment de la honte. Il passe des heures à se filmer devant la glace en train de pleurer ou de réfléchir. Il fait ses gammes.
Les nombreuses critiques dont il est victime, selon lui à tort, le plongent dans une profonde réflexion sur l'injustice. Avec l’œuf, personne n’a bien compris son intention. Véranda (une amie proche à qui il consacrera un film plus tard) le soutient inconditionnellement et propose de financer son prochain long métrage. « Mais qu’est-ce que tu attends ! explique-leur ! tu l’as dit toi-même : tu es là pour regarder le regard… ou quelque chose comme ça, enfin j’ai pas bien compris ».
L’idée de répondre à ses détracteurs en leur expliquant son film précédent le séduit. Mais cette fois-ci, il va creuser davantage le scénario. Utiliser de vrais acteurs humains. Sacrifier à la bienséante couleur noir et blanc. On lui a tellement reproché le jaune.
Il s’enferme dans sa chambre pendant quinze jours et quinze nuits. Quand il ressort, considérablement amaigri, le script est prêt. Il reste à le tourner.
Note préliminaire de Sigmund Toll, psychiatre.
L’Intention est, selon moi, le premier chef d’œuvre d’Olaf Stromberg. J’ai bien dû le visionner cinq cent fois mais à chaque fois je le redécouvre. Comment, à 19 ans, a-t-il pu aussi bien assumer la réflexion sur la clarté, son incidence sur la compréhension des évènements ? Bien sûr, il a puisé dans le traumatisme de l’œuf, mais ceci n’explique pas tout. Ce film de très petit budget est d’une lucidité exemplaire. Un peu comme s’il avait voulu « purifier son discours » mais sans jamais « se renier ».
Dans L’Intention, le début est volontairement confus pour jouer sur les contrastes embrouille/désembrouille. Son père joue son propre rôle (celui de son fils), sa mère également (le rôle de sa propre mère). Il est question, et là plus aucun doute n’est possible, d’un achat de voiture (celle de sa sœur en réalité).
Les voisins (joués par les voisins) observent la nouvelle acquisition mais aucune parole échangée n’est gratuite. A partir de là, Olaf s’attache à supprimer absolument toute ambiguïté. Les dialogues s'en ressentent « tiens, il a acheté une nouvelle voiture… » « qui ? » « Björg, notre voisin ». Les répliques viennent appuyer l’image pour éradiquer toute équivoque. Clarté des dialogues, clarté de la situation. Lorsque l’un d’eux est jaloux, il dit « je suis un peu jaloux ». Les scènes sont croyablement limpides et explicites. On imagine le travail en amont pour rendre une histoire, au demeurant assez banale, aussi ennuyeuse. Du grand art.
Il restait à expliquer correctement le titre. Et là, Olaf Stromberg, réussit une ellipse d’une maîtrise totale mais « sans » surprise. Après un accident, il rend le véhicule à son précédent propriétaire avec cette phrase magnifique et lourde de sens : « j’ai l’intention maintenant de marcher à pied »
Certains cinéphiles en voudront à Olaf lorsque, plus tard, il se détournera des films ennuyeux pour filmer des western. "son Intention en cachait une autre : celle de surprendre"
L’intention (1967)
Suède – comédie familiale dramatique – noir et blanc - durée 1 H 35 mn
Réalisé par Olaf Stromberg avec Heide Stromberg, Björk Stromberg, Görtl Stromberg
Histoire : Björg fait l’acquisition, par le biais des petites annonces, d’un véhicule d’occasion. Ses voisins sont jaloux et le disent. Il fait mine de s’en désintéresser mais sa conduite s’en ressent. Il provoque un accident et la voiture qu’il a acheté est cassée, il faut appeler une dépanneuse. Il la rend au vendeur et lui dit « j’ai l’intention maintenant de marcher à pied ». Fin.
Son film est tantôt adulé, tantôt conspué. Il ne dit rien mais il en souffre.
Il en profite pour approfondir sa connaissance sur le sentiment de la honte. Il passe des heures à se filmer devant la glace en train de pleurer ou de réfléchir. Il fait ses gammes.
Les nombreuses critiques dont il est victime, selon lui à tort, le plongent dans une profonde réflexion sur l'injustice. Avec l’œuf, personne n’a bien compris son intention. Véranda (une amie proche à qui il consacrera un film plus tard) le soutient inconditionnellement et propose de financer son prochain long métrage. « Mais qu’est-ce que tu attends ! explique-leur ! tu l’as dit toi-même : tu es là pour regarder le regard… ou quelque chose comme ça, enfin j’ai pas bien compris ».
L’idée de répondre à ses détracteurs en leur expliquant son film précédent le séduit. Mais cette fois-ci, il va creuser davantage le scénario. Utiliser de vrais acteurs humains. Sacrifier à la bienséante couleur noir et blanc. On lui a tellement reproché le jaune.
Il s’enferme dans sa chambre pendant quinze jours et quinze nuits. Quand il ressort, considérablement amaigri, le script est prêt. Il reste à le tourner.
Note préliminaire de Sigmund Toll, psychiatre.
L’Intention est, selon moi, le premier chef d’œuvre d’Olaf Stromberg. J’ai bien dû le visionner cinq cent fois mais à chaque fois je le redécouvre. Comment, à 19 ans, a-t-il pu aussi bien assumer la réflexion sur la clarté, son incidence sur la compréhension des évènements ? Bien sûr, il a puisé dans le traumatisme de l’œuf, mais ceci n’explique pas tout. Ce film de très petit budget est d’une lucidité exemplaire. Un peu comme s’il avait voulu « purifier son discours » mais sans jamais « se renier ».
Dans L’Intention, le début est volontairement confus pour jouer sur les contrastes embrouille/désembrouille. Son père joue son propre rôle (celui de son fils), sa mère également (le rôle de sa propre mère). Il est question, et là plus aucun doute n’est possible, d’un achat de voiture (celle de sa sœur en réalité).
Les voisins (joués par les voisins) observent la nouvelle acquisition mais aucune parole échangée n’est gratuite. A partir de là, Olaf s’attache à supprimer absolument toute ambiguïté. Les dialogues s'en ressentent « tiens, il a acheté une nouvelle voiture… » « qui ? » « Björg, notre voisin ». Les répliques viennent appuyer l’image pour éradiquer toute équivoque. Clarté des dialogues, clarté de la situation. Lorsque l’un d’eux est jaloux, il dit « je suis un peu jaloux ». Les scènes sont croyablement limpides et explicites. On imagine le travail en amont pour rendre une histoire, au demeurant assez banale, aussi ennuyeuse. Du grand art.
Il restait à expliquer correctement le titre. Et là, Olaf Stromberg, réussit une ellipse d’une maîtrise totale mais « sans » surprise. Après un accident, il rend le véhicule à son précédent propriétaire avec cette phrase magnifique et lourde de sens : « j’ai l’intention maintenant de marcher à pied »
Certains cinéphiles en voudront à Olaf lorsque, plus tard, il se détournera des films ennuyeux pour filmer des western. "son Intention en cachait une autre : celle de surprendre"
L’intention (1967)
Suède – comédie familiale dramatique – noir et blanc - durée 1 H 35 mn
Réalisé par Olaf Stromberg avec Heide Stromberg, Björk Stromberg, Görtl Stromberg
Histoire : Björg fait l’acquisition, par le biais des petites annonces, d’un véhicule d’occasion. Ses voisins sont jaloux et le disent. Il fait mine de s’en désintéresser mais sa conduite s’en ressent. Il provoque un accident et la voiture qu’il a acheté est cassée, il faut appeler une dépanneuse. Il la rend au vendeur et lui dit « j’ai l’intention maintenant de marcher à pied ». Fin.
- peg-harty
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Un homme nommé lapin (1968)
L’Intention est bien accueilli par un public de passionnés. Dès sa sortie en 1967, les Brouillons du Cinéma, toujours à la recherche de nouveautés, s’enflamment et classent le film dans une catégorie à part : « le road-movie réaliste à pied ».
L’époque est au twist et, en Europe, les deux copies du film circulent de ciné club en ciné club. Là-bas, partout, la réaction est unanime. Des garçons en pull moulant et pantalon Tergal sucent les branches de leurs grosses lunettes et déclarent lentement : c’est nouveau, c’est vague… c’est révolutionnaire.
De nouvelles idées germent dans la tête d’une génération et Olaf commence à voyager. En 1968 Il est invité dans des caves pour des happenings et passe le plus clair de son temps à boire du Peppermint et à expliquer le concept novateur du regard qui regarde son propre regard devant un auditoire qui danse le Madison.
Plus tard, il avouera qu’il n’aimait pas vraiment le Peppermint mais qu’il adorait sa couleur. Lors d’un séjour à Paris en mai, il prend fait et cause pour les jeunes qui se battent contre la dictature des généraux. Il feint de s’intéresser aux soirées poésies réalistes mais son esprit est ailleurs : il réfléchit à son prochain long métrage « un homme nommé lapin ».
Un homme nommé lapin (1968)
Long métrage 35 mm (couleur) – reportage animalier - Durée : 1 H 24 mn.
Réalisé par Olaf Stromberg avec Rasmus-Emil Swampanäsattsson, Gösta, Nils, Olle, Kajsa, Grynet…
Musique : Rolly och ricky
L’histoire : A la recherche de la société parfaite, un vieil homme décide d’intégrer une colonie de lapins. Pour se faire accepter, il doit remettre en cause bien des idées reçues.
________________________________________________________________________
Un Homme nommé lapin marque un virage important dans la filmographie du réalisateur suédois. Il a mûri et jette un regard critique sur la société de consommation. Le comédien Rasmus-Emil Swampanäsattsson confiera plus tard que ce fût le rôle de sa vie et qu’il aura mis du temps à s’en remettre car on ne ressort pas intact d’une telle aventure. Les conditions du tournage sont éprouvantes : les lapins sont craintifs et s’enfuient devant la caméra.
Rasmus, très concerné, usera de stratagèmes divers pour se faire accepter par eux. Le spectateur, médusé, assiste en direct à cette métamorphose avec, en point d’orgue, la scène de l’offrande de la poire qui remettra en cause définitivement bien des croyances sur ces dangereux animaux.
Anecdotiquement, dans sa marche de l’empereur, Luc Jacquet rendra un hommage appuyé à Olaf Stromberg. (Cf : la scène des œufs, la fuite des manchots devant la caméra…)
L’époque est au twist et, en Europe, les deux copies du film circulent de ciné club en ciné club. Là-bas, partout, la réaction est unanime. Des garçons en pull moulant et pantalon Tergal sucent les branches de leurs grosses lunettes et déclarent lentement : c’est nouveau, c’est vague… c’est révolutionnaire.
De nouvelles idées germent dans la tête d’une génération et Olaf commence à voyager. En 1968 Il est invité dans des caves pour des happenings et passe le plus clair de son temps à boire du Peppermint et à expliquer le concept novateur du regard qui regarde son propre regard devant un auditoire qui danse le Madison.
Plus tard, il avouera qu’il n’aimait pas vraiment le Peppermint mais qu’il adorait sa couleur. Lors d’un séjour à Paris en mai, il prend fait et cause pour les jeunes qui se battent contre la dictature des généraux. Il feint de s’intéresser aux soirées poésies réalistes mais son esprit est ailleurs : il réfléchit à son prochain long métrage « un homme nommé lapin ».
Un homme nommé lapin (1968)
Long métrage 35 mm (couleur) – reportage animalier - Durée : 1 H 24 mn.
Réalisé par Olaf Stromberg avec Rasmus-Emil Swampanäsattsson, Gösta, Nils, Olle, Kajsa, Grynet…
Musique : Rolly och ricky
L’histoire : A la recherche de la société parfaite, un vieil homme décide d’intégrer une colonie de lapins. Pour se faire accepter, il doit remettre en cause bien des idées reçues.
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Un Homme nommé lapin marque un virage important dans la filmographie du réalisateur suédois. Il a mûri et jette un regard critique sur la société de consommation. Le comédien Rasmus-Emil Swampanäsattsson confiera plus tard que ce fût le rôle de sa vie et qu’il aura mis du temps à s’en remettre car on ne ressort pas intact d’une telle aventure. Les conditions du tournage sont éprouvantes : les lapins sont craintifs et s’enfuient devant la caméra.
Rasmus, très concerné, usera de stratagèmes divers pour se faire accepter par eux. Le spectateur, médusé, assiste en direct à cette métamorphose avec, en point d’orgue, la scène de l’offrande de la poire qui remettra en cause définitivement bien des croyances sur ces dangereux animaux.
Anecdotiquement, dans sa marche de l’empereur, Luc Jacquet rendra un hommage appuyé à Olaf Stromberg. (Cf : la scène des œufs, la fuite des manchots devant la caméra…)
Dernière édition par peg-harty le 25 Nov 2018 12:35, édité 2 fois.
- peg-harty
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Un homme nommé lapin
Les étudiants passionnés par Olaf Stromberg peuvent commander via ce site deux ouvrages de référence sur le tournage de Un homme nommé lapin.
Secrets de tournage, anecdotes, photos exclusives, nourriture des lapins, script original...
Pour le moment ce livre n'est disponible qu'en langue suédoise et en langue italienne mais avec une bonne traduction Google, le curieux pénètrera l'étrange univers d'Olaf Stromberg.
15 euros (préciser quelle version vous désirez et votre motivation... thèse, curiosité, etc)
l'Affiche originale du film
les ouvrages de références sur le tournage - éditions öslö - version suédoise
- éditions öslö - version italienne
Secrets de tournage, anecdotes, photos exclusives, nourriture des lapins, script original...
Pour le moment ce livre n'est disponible qu'en langue suédoise et en langue italienne mais avec une bonne traduction Google, le curieux pénètrera l'étrange univers d'Olaf Stromberg.
15 euros (préciser quelle version vous désirez et votre motivation... thèse, curiosité, etc)
l'Affiche originale du film
les ouvrages de références sur le tournage - éditions öslö - version suédoise
- éditions öslö - version italienne
Dernière édition par peg-harty le 25 Nov 2018 11:50, édité 1 fois.
- peg-harty
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Un homme nommé lapin dans son contexte
Dans notre série comprendre l'Olaf, nous allons resituer "Un homme nommé lapin" dans son contexte pour en saisir l'aspect visionnaire.
1967
Par la fenêtre le bruit assourdissant du Concorde énerve les riverains. En Grèce, des colonels font de la publicité pour Ray-ban. Un autre général, français celui-là, propose de libérer sémantiquement le Québec. Israël survole pendant six jours l'Egypte. Le peuple antique ne peut plus dormir.
Cannes décerne la palme d'or à Antoine pour Blow-up. (l'histoire d'un mignon photographe quasi autiste qui écoute de la musique pop en photographiant des écureuils et des filles). Catherine Deneuve, Belle de jour comme de nuit, pleure la mort de Françoise. Bénjamin se remémore son dépucelage et préfigure la téléréalité. Melville transforme Delon en Samouraï dans un métro mécanique et déshumanisé. Les allées et venues du fauve sont surveillées sur un écran où clignote sa position. Du GPS avant la date.
La carte à puce, le téléphone portable, internet ne sont pas encore inventés mais tout est prêt pour que l'homme cède la place à la machine.
Olaf observe le monde qui fait et dit n'importe quoi. Il s'interroge : Où est l'avenir ?
Que peut-on opposer aux forces brutales qui risquent de tout enlaidir ?
Olaf se tourne vers Le Lapin ! le Roi de la nature. Fier, prudent et malicieux. Gentil comme tout. On ne peut qu’être émerveillé par l’esprit visionnaire du réalisateur suédois. Ecologie appliquée, amour, osmose entre les êtres quelles que soient la couleur de leurs poils et la longueur de leurs oreilles.
Stromberg montre la voie et les étudiants comprennent qu’il faut réagir. Vite, si possible avant mai 1968 si l’on veut empêcher la guerre du Vietnam qui est déjà annoncée.
1967
Par la fenêtre le bruit assourdissant du Concorde énerve les riverains. En Grèce, des colonels font de la publicité pour Ray-ban. Un autre général, français celui-là, propose de libérer sémantiquement le Québec. Israël survole pendant six jours l'Egypte. Le peuple antique ne peut plus dormir.
Cannes décerne la palme d'or à Antoine pour Blow-up. (l'histoire d'un mignon photographe quasi autiste qui écoute de la musique pop en photographiant des écureuils et des filles). Catherine Deneuve, Belle de jour comme de nuit, pleure la mort de Françoise. Bénjamin se remémore son dépucelage et préfigure la téléréalité. Melville transforme Delon en Samouraï dans un métro mécanique et déshumanisé. Les allées et venues du fauve sont surveillées sur un écran où clignote sa position. Du GPS avant la date.
La carte à puce, le téléphone portable, internet ne sont pas encore inventés mais tout est prêt pour que l'homme cède la place à la machine.
Olaf observe le monde qui fait et dit n'importe quoi. Il s'interroge : Où est l'avenir ?
Que peut-on opposer aux forces brutales qui risquent de tout enlaidir ?
Olaf se tourne vers Le Lapin ! le Roi de la nature. Fier, prudent et malicieux. Gentil comme tout. On ne peut qu’être émerveillé par l’esprit visionnaire du réalisateur suédois. Ecologie appliquée, amour, osmose entre les êtres quelles que soient la couleur de leurs poils et la longueur de leurs oreilles.
Stromberg montre la voie et les étudiants comprennent qu’il faut réagir. Vite, si possible avant mai 1968 si l’on veut empêcher la guerre du Vietnam qui est déjà annoncée.
- peg-harty
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peg-harty a écrit:1967
Par la fenêtre le bruit assourdissant du Concorde énerve les riverains.
Ultime pied de nez d'Olaf, la mise en scène du Concorde, 2 ans avant son vol inaugural, nous suggère que l'accélération des techniques dépassent notre temporalité subjective, nous rend sourd à nous-même (aucun besoin de rappeler ici la métaphore des grandes oreilles sous-jacente au film).
- alec_eiffel
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- Inscription Forum: 08 Jan 2004 0:28
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alec_eiffel a écrit:peg-harty a écrit:1967
Par la fenêtre le bruit assourdissant du Concorde énerve les riverains.
Ultime pied de nez d'Olaf, la mise en scène du Concorde, 2 ans avant son vol inaugural, nous suggère que l'accélération des techniques dépassent notre temporalité subjective, nous rend sourd à nous-même (aucun besoin de rappeler ici la métaphore des grandes oreilles sous-jacente au film).
Excellent travail cher alec-eiffel.
Vos travaux de recherche sur le grand oiseau blanc sont confirmés par plusieurs riverains. Le Concorde fit le premier test en vol au-dessus de Toulouse le 2 mars 1969 avec André Turcat aux commandes, secondé par Jacques Guignard, Henri Perrier et Michel Retif, ce vol dura 29 minutes.
Deux hypothèses sont devenues envisageables :
- soit le rédacteur de la note sur l'année 1967 s'est trompé. Confondant "année de création" du Concorde avec "vol inaugural" et je m'en désole. Une anticipation qui nuit considérablement à la compréhension de l'artiste dans son époque.
- soit votre théorie de l'accélération des techniques qui dépassent notre temporalité subjective est en passe d'être démontrée et je vous en félicite. Votre conclusion est admirable et ouvre un champ de perspective nouvelle à la science. Si elle se vérifiait, si nous pouvions l'expérimenter en laboratoire, les implications sur notre vie quotidienne seraient immenses !
Dans les deux cas, nous ne pouvons que vous remercier d'avoir soulevé ce lièvre. Le travail de l'artiste n'est-il pas -aussi- de seconder la science ? de lui faire envisager un monde possible au-delà de la réalité actuelle ? Le futur de demain n'est-il pas embryonnaire aujourd'hui ?
Olaf Stromberg n'a pas fini de nous surprendre.
- peg-harty
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Chérie, j'ai mangé des cerises
Chérie, j’ai mangé des cerises (1969)
Long métrage 35 mm (couleur) – espion, contre-espion, action, pacifiste - Durée : 1 H 43 mn.
Réalisé par Olaf Stromberg avec Heide, Björk, Görtl et Antia Stromberg
L’histoire : Hans, sa femme et sa fille, pacifistes convaincus, en vacances au Liban se retrouvent sans le savoir en possession d’un microfilm qui remettrait en cause l’équilibre Est-Ouest. Le KGB et plusieurs services de contre-espionnage ont retrouvé leur trace. Mais qui est qui ? Dans le doute, la famille fuit à travers le monde entier.
Un bus lancé à vive allure dans la plaine de la Bekaa et poursuivi par des hommes à pied. Une soirée Bingo dans une maison de retraite qui se révèle être un nid d’espions. Des femmes hystériques qui crient pour un rien. D’anodines rédactions de cartes postales. Un faux cadavre mystérieux…
Avec « chérie, j’ai mangé les cerises », Olaf Stromberg nous procure un divertissement qui mêle suspense et vie familiale. Une construction exemplaire, un rythme haletant entrecoupé de scènes banales ou désopilantes comme la rédaction de cartes postales à la terrasse d’un café avec un stylo défectueux.
Mais le danger n’est jamais très éloigné. Le spectateur sait qu’une musique guillerette annonce toujours un cataclysme, qu’un coup de tonnerre est annonciateur de changements brutaux. Dans ce film, Olaf avec maestria, nous donne une leçon de cinéma époustouflante en appliquant tous les codes du genre puis, pour passer l’estocade, en invente de nouveaux.
- Un plan fixe sur la lune nous indique qu’il va dormir car il fait nuit.
- Un gros plan à peine appuyé sur un objet anodin nous met en alerte.
- Une voiture refuse de démarrer alors que c’est urgent…
- Une femme prend une douche et croit parler à quelqu’un qu’elle connaît…
- Un éclat de soleil sur son arme démasque un tireur embusqué
- Une voiture se rapproche dangereusement d’un ravin et les cailloux giclent
- Le laitier passe trop tôt et le héros trouve ça louche
- On découvre un cadavre et la musique s’amplifie
- Un téléphone sonne dans le vide alors que c’est important
- Le revolver s’enraye au mauvais moment
- La femme veut hurler mais on lui met la main sur la bouche
- La famille court, main dans la main, mais les autres se rapprochent dangereusement.
- Il a toujours, au dernier moment, une bonne idée pour s’en sortir.
-
… et la liste est longue.
Long métrage 35 mm (couleur) – espion, contre-espion, action, pacifiste - Durée : 1 H 43 mn.
Réalisé par Olaf Stromberg avec Heide, Björk, Görtl et Antia Stromberg
L’histoire : Hans, sa femme et sa fille, pacifistes convaincus, en vacances au Liban se retrouvent sans le savoir en possession d’un microfilm qui remettrait en cause l’équilibre Est-Ouest. Le KGB et plusieurs services de contre-espionnage ont retrouvé leur trace. Mais qui est qui ? Dans le doute, la famille fuit à travers le monde entier.
Un bus lancé à vive allure dans la plaine de la Bekaa et poursuivi par des hommes à pied. Une soirée Bingo dans une maison de retraite qui se révèle être un nid d’espions. Des femmes hystériques qui crient pour un rien. D’anodines rédactions de cartes postales. Un faux cadavre mystérieux…
Avec « chérie, j’ai mangé les cerises », Olaf Stromberg nous procure un divertissement qui mêle suspense et vie familiale. Une construction exemplaire, un rythme haletant entrecoupé de scènes banales ou désopilantes comme la rédaction de cartes postales à la terrasse d’un café avec un stylo défectueux.
Mais le danger n’est jamais très éloigné. Le spectateur sait qu’une musique guillerette annonce toujours un cataclysme, qu’un coup de tonnerre est annonciateur de changements brutaux. Dans ce film, Olaf avec maestria, nous donne une leçon de cinéma époustouflante en appliquant tous les codes du genre puis, pour passer l’estocade, en invente de nouveaux.
- Un plan fixe sur la lune nous indique qu’il va dormir car il fait nuit.
- Un gros plan à peine appuyé sur un objet anodin nous met en alerte.
- Une voiture refuse de démarrer alors que c’est urgent…
- Une femme prend une douche et croit parler à quelqu’un qu’elle connaît…
- Un éclat de soleil sur son arme démasque un tireur embusqué
- Une voiture se rapproche dangereusement d’un ravin et les cailloux giclent
- Le laitier passe trop tôt et le héros trouve ça louche
- On découvre un cadavre et la musique s’amplifie
- Un téléphone sonne dans le vide alors que c’est important
- Le revolver s’enraye au mauvais moment
- La femme veut hurler mais on lui met la main sur la bouche
- La famille court, main dans la main, mais les autres se rapprochent dangereusement.
- Il a toujours, au dernier moment, une bonne idée pour s’en sortir.
-
… et la liste est longue.
- peg-harty
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Chérie, j'ai mangé des cerises dans son contexte historique
Chérie, j’ai mangé des cerises (1969)
Situons le film dans son époque.
1969. Sauf erreur, Tintin a marché sur la lune. A Woodstock, Jimi Hendrix tricote sa guitare en mâchant du chewing-gum. Sharon Tate est assassinée. Pour aider un peuple qui souffre, les GI déversent du napalm au Vietnam.
Cannes courronne If… de Anderson. Un film engagé que personne n’a vu et c’est bien dommage car on sent très nettement une influence Strombergienne, époque de l’Oeuf.
Extrait du site du festival de Cannes : « en plus d'une critique corosive, If... emprunte admirablement la théorie Brechtienne qui tend à susciter une participation objective du spectateur. Plusieurs éléments du film d'Anderson distancient le spectateur du film et le fait constamment réfléchir et lui fait prendre une position critique face à ce qui lui est montré. Par exemple, l'utilisation intermittente de séquences en noir et blanc et en couleur (même si elles étaient au départ pour des raisons économiques) donnent au film un caractère expressif, mais surtout un effet qui rappelle aux spectateurs que ce qu'il voit est avant tout un film et rien d'autre ». Du pur Stromberg !
Ailleurs, Hopper et Nicholson roulent en moto persuadés qu’ils sont nés pour être sauvage (Easy Rider) tandis que dans un bus, Dustin Hoffman accompagne un gigolo dans une lente descente aux enfers (macadam cowboy).
De nouveaux noms apparaissent dans les festivals underground : Jim Jarmush, Spike Lee, Wim Wenders. Olaf les initie au Peppermint. Ils font la grimace.
Politiquement, dans chacun des deux blocs, pro-soviétique et pro-américain, les deux Grands sont contestés. Le modèle soviétique est remis en question en Europe de l’Est. En Tchécoslovaquie le rêve du Printemps de Prague touche à sa fin.
C’est dans ce climat de guerre froide et de fausse détente Est/ouest que « Chérie, j’ai mangé des cerises » prend toute son amplitude.
Les cerises… le temps des cerises… Manger… déglutir… Les convictions s’estompent et une troisième voie alter-mondialiste se dessine. Refus de la guerre, refus de prendre position pour l’un des deux modèles de société. Conséquence, la fuite, le bus, la découverte du Liban et de ses spécialités culinaires (le vin de Kefraïa, le libanais).
Un observateur attentif notera l’état de semi-ébriété du personnage principal lors de la grande scène explicative sur sa position pacifiste :
-woèèè tu vouaaa, si je donne le microfilm à heuuux, ils vont maaal l’utiliser, tu vouaaa. Mais les z’autres, c’est pareiiil, tu voaaaa l’embarras. Le miiieux pour le moooment, c’est la fuuuiiite. On pourrait allller, ch’sais paaas, en Agfnisthan, ou à Kathmandu ou au Marroooc.
Un film-fissure qui contribuera beaucoup à ébranler les convictions puis le mur de Berlin…
Situons le film dans son époque.
1969. Sauf erreur, Tintin a marché sur la lune. A Woodstock, Jimi Hendrix tricote sa guitare en mâchant du chewing-gum. Sharon Tate est assassinée. Pour aider un peuple qui souffre, les GI déversent du napalm au Vietnam.
Cannes courronne If… de Anderson. Un film engagé que personne n’a vu et c’est bien dommage car on sent très nettement une influence Strombergienne, époque de l’Oeuf.
Extrait du site du festival de Cannes : « en plus d'une critique corosive, If... emprunte admirablement la théorie Brechtienne qui tend à susciter une participation objective du spectateur. Plusieurs éléments du film d'Anderson distancient le spectateur du film et le fait constamment réfléchir et lui fait prendre une position critique face à ce qui lui est montré. Par exemple, l'utilisation intermittente de séquences en noir et blanc et en couleur (même si elles étaient au départ pour des raisons économiques) donnent au film un caractère expressif, mais surtout un effet qui rappelle aux spectateurs que ce qu'il voit est avant tout un film et rien d'autre ». Du pur Stromberg !
Ailleurs, Hopper et Nicholson roulent en moto persuadés qu’ils sont nés pour être sauvage (Easy Rider) tandis que dans un bus, Dustin Hoffman accompagne un gigolo dans une lente descente aux enfers (macadam cowboy).
De nouveaux noms apparaissent dans les festivals underground : Jim Jarmush, Spike Lee, Wim Wenders. Olaf les initie au Peppermint. Ils font la grimace.
Politiquement, dans chacun des deux blocs, pro-soviétique et pro-américain, les deux Grands sont contestés. Le modèle soviétique est remis en question en Europe de l’Est. En Tchécoslovaquie le rêve du Printemps de Prague touche à sa fin.
C’est dans ce climat de guerre froide et de fausse détente Est/ouest que « Chérie, j’ai mangé des cerises » prend toute son amplitude.
Les cerises… le temps des cerises… Manger… déglutir… Les convictions s’estompent et une troisième voie alter-mondialiste se dessine. Refus de la guerre, refus de prendre position pour l’un des deux modèles de société. Conséquence, la fuite, le bus, la découverte du Liban et de ses spécialités culinaires (le vin de Kefraïa, le libanais).
Un observateur attentif notera l’état de semi-ébriété du personnage principal lors de la grande scène explicative sur sa position pacifiste :
-woèèè tu vouaaa, si je donne le microfilm à heuuux, ils vont maaal l’utiliser, tu vouaaa. Mais les z’autres, c’est pareiiil, tu voaaaa l’embarras. Le miiieux pour le moooment, c’est la fuuuiiite. On pourrait allller, ch’sais paaas, en Agfnisthan, ou à Kathmandu ou au Marroooc.
Un film-fissure qui contribuera beaucoup à ébranler les convictions puis le mur de Berlin…
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. (1970)
. (1970)
Suède (couleurs) – film politique psychédélique – durée 1 h 44 mn
Sujet : Un pays d’Amérique du sud non-identifié. Un syndicaliste sidérurgique découvre par hasard qu’il vit dans état fasciste. Le gouvernement tente de le corrompre, puis de le torturer, puis de le tuer. Il se réfugie dans la poésie.
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Le film . (prononcer point) a suscité une énorme polémique – probablement lié à la véracité des faits – et la scène de la torture est devenue un grand classique du genre.
… un homme est attaché à une chaise et on lui lit des textes de Brecht. (en allemand). Un seul témoin veut s’interposer et réduire sa souffrance en criant, encore plus fort, les paroles d’une chanson de Sheila. Tous les autres récitent sans comprendre les poésies. Simplement car une « autorité » légitimée par un uniforme leur en donne l’ordre.
Derrière une vitre sans tain un homme en blouse blanche observe la torture, sans savoir que lui-même est surveillé derrière une autre baie vitrée, par des scientifiques. Ils essayent de comprendre comment réagit un homme qui croit qu’il est très malin.
La perversion devient totale lorsque, au final, on découvre que le pseudo « torturé » est en réalité l’instigateur de l’expérience. La question se résumant à : « un texte de Brecht peut-il être assimilé à une souffrance » ?
Olaf Stromberg dans . nous plonge dans un habile questionnement. La véritable expérience (il est en cela fidèle à sa philosophie du regard qui regarde le regard) étant, mais peu s’en doutent : comment le spectateur, dans la salle, réagira-t-il à ces expériences à étages.
Jeu de miroir, perspectives alambiquées, faux-vrais semblants, échiquier rond, tout le savoir-faire d’Olaf se retrouve dans cette satyre politique qui n’a pas pris une ride.
Anecdote : tous les acteurs ont travaillé sous acide. (en réalité un placebo). On dit aussi que Patrick McGoohan et Rover, son très grand ballon blanc, après avoir applaudi le numéro d’acteur, auraient intenté un procès pour plagiat de leur série « le prisonnier ». Bonjour chez vous.
Dernière édition par peg-harty le 25 Nov 2018 11:54, édité 1 fois.
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Le roi de la Montagne (1971)
Le roi de la montagne (1971)
Suède (couleurs) – film d’altitude – durée 1 h 35 mn
Sujet : Kaminöffen, un modeste employé comptable, décide du jour au lendemain de tout plaquer pour gravir l’Everest (8 849,87 mètres). Armé de sa seule volonté, sans matériel, sans entraînement, sans expérience particulière de la montagne.
Va-t-il réussir ?
Explication du tournage : Ce film est placé sous le signe du défi personnel. Après le succès de . (prononcez point) Olaf désire prendre de la hauteur et se rend en Himalaya sur le toit du monde. La sérénité du lieu est propice à la méditation. Il observe, du dessus, le vol des aigles et commence à relativiser beaucoup de choses. Il est là pour les repérages.
La nuit tombe et il commence à faire frisquet. Dans sa précipitation il constate qu’il n’a pas emmené de petite laine et l’équipe technique est encore loin, en contrebas. Il construit un igloo de trente mètres sur vingt et se demande s’il survivra à l’attente. Il aimerait allumer un bon feu mais à cette hauteur, il n’y a pas de bois. Il en a aperçu dans la plaine et décide, malgré les bourrasques, d’aller en chercher. Pendant la descente, ses pensées sont ailleurs : comment apporter une crédibilité au personnage de Kaminöffen ?
C’est durant la deuxième ascension, en remontant le bois, qu’il mettra au point tous les détails du film qui rendront, comme jamais, hommage à sa majesté l’Everest.
Rajout du 19 mars 2011 :
On a beaucoup évoqué, à l'occasion du tournage du Roi de la montagne, le mythe de Sisyphe. Certains érudits notaient la similitude et se sont demandés comment il avait fait pour survivre à l'éboulement de la face nord. D'autres le voyaient enseveli et colportait déjà la triste nouvelle. Olaf a simplement fait corps avec la montagne. (bon, ok, il utilisait également une corde solide, son courage). Un bon emmental est indispensable à qui veut franchir avec succès le caractère pseudo inexorable d'un mythe. La deuxième remontée fut beaucoup moins problématique car les rochers s'étaient effondrés lors du premier passage.
Dernière édition par peg-harty le 25 Nov 2018 11:55, édité 2 fois.
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1970 - 1971
1970 - 1971 une époque étrange
petit rappel historique.
Cannes offre ses palmes successivement à MASH de Robert Altman (1970) puis à Le messager de Joseph Losey (1971).
Olaf n’est pas invité. Il apprend que Mort à Venise obtient une palme exceptionnelle et que Charlot à 82 ans obtient une légion d’honneur et une standing-ovation de quatre jours. Il soupire… et provoque un scandale.
Un journaliste de twist l’interroge et lui demande son avis sur toutes ces nominations :
« Mash, oui, c’est pas mal. Personnellement, dans le même registre, j’ai trouvé « les bidasses en folie » plus novateur, plus irrévérencieux. Quant à Le messager, ça m’étonnerait que j’en pense quelque chose car pour cela, il faudrait que je le visionne et ça, ça m’étonnerait. Mort à Venise ? trop de lenteur, faut être mort ou très vieux pour supporter, c’est sûr. Quant aux Charlots, je suis content qu’on leur ait remis quatre légions d’honneur. C’est largement mérité ! »
Ces déclarations, légèrement exagérées, qu’il mettra, bien plus tard sur le compte d’un excès de Peppermint, lui valent l’exclusion momentanément des cercles bien pensants. Il observe la poutre de sa cheminée et fulmine en silence «pourquoi on me donne pas de prix, y’a de la place… ».
Depuis Le roi de la montagne, Olaf Stromberg, a comme le disent les électriciens « pété un fusible ». Il côtoie presque exclusivement des musiciens de pop musik. Dès qu’il en a l’occasion, il roule au ralenti dans des pentes herbeuses comme dans un scopitone hippie. C’est son époque Flower power hargneuse. Entouré de filles qui lui caressent les cheveux, il côtoie des musiciens et tel un gourou déjanté tient des propos incohérents :
« imagine, y’aurait pas d’enfer… c’est facile si tu veux… imagine, pas de paradis… que le ciel au-dessus de nous… imagine, tous les gens, tu vois qui vivraient pour aujourd’hui »
John Lennon prend des notes. Mais Veranda, la fidèle amie d’Olaf, s’inquiète de son comportement de plus en plus bizarre : un jour il est végétarien, le lendemain il annonce qu’il ouvre des portes, et, bien plus inquiétant, il ne se nourrit plus que de Peppermint.
Veranda sait que le seul moyen de le tirer de cette impasse c’est de le convaincre de retourner derrière la caméra : Ce sera l’incroyable « le Défi du magicien ». Une œuvre très étrange…
petit rappel historique.
Cannes offre ses palmes successivement à MASH de Robert Altman (1970) puis à Le messager de Joseph Losey (1971).
Olaf n’est pas invité. Il apprend que Mort à Venise obtient une palme exceptionnelle et que Charlot à 82 ans obtient une légion d’honneur et une standing-ovation de quatre jours. Il soupire… et provoque un scandale.
Un journaliste de twist l’interroge et lui demande son avis sur toutes ces nominations :
« Mash, oui, c’est pas mal. Personnellement, dans le même registre, j’ai trouvé « les bidasses en folie » plus novateur, plus irrévérencieux. Quant à Le messager, ça m’étonnerait que j’en pense quelque chose car pour cela, il faudrait que je le visionne et ça, ça m’étonnerait. Mort à Venise ? trop de lenteur, faut être mort ou très vieux pour supporter, c’est sûr. Quant aux Charlots, je suis content qu’on leur ait remis quatre légions d’honneur. C’est largement mérité ! »
Ces déclarations, légèrement exagérées, qu’il mettra, bien plus tard sur le compte d’un excès de Peppermint, lui valent l’exclusion momentanément des cercles bien pensants. Il observe la poutre de sa cheminée et fulmine en silence «pourquoi on me donne pas de prix, y’a de la place… ».
Depuis Le roi de la montagne, Olaf Stromberg, a comme le disent les électriciens « pété un fusible ». Il côtoie presque exclusivement des musiciens de pop musik. Dès qu’il en a l’occasion, il roule au ralenti dans des pentes herbeuses comme dans un scopitone hippie. C’est son époque Flower power hargneuse. Entouré de filles qui lui caressent les cheveux, il côtoie des musiciens et tel un gourou déjanté tient des propos incohérents :
« imagine, y’aurait pas d’enfer… c’est facile si tu veux… imagine, pas de paradis… que le ciel au-dessus de nous… imagine, tous les gens, tu vois qui vivraient pour aujourd’hui »
John Lennon prend des notes. Mais Veranda, la fidèle amie d’Olaf, s’inquiète de son comportement de plus en plus bizarre : un jour il est végétarien, le lendemain il annonce qu’il ouvre des portes, et, bien plus inquiétant, il ne se nourrit plus que de Peppermint.
Veranda sait que le seul moyen de le tirer de cette impasse c’est de le convaincre de retourner derrière la caméra : Ce sera l’incroyable « le Défi du magicien ». Une œuvre très étrange…
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le défi du magicien
Le défi du magicien (1971)
Suède (couleurs) – film fantastique – durée 1 h 35 mn
Sujet : Görgl Schlurraf, complètement par hasard, découvre qu’il est magicien. Il vit exclusivement dans le passé. Son existence se résume à J-1. Il lui reste à découvrir comment utiliser son étrange pouvoir et c’est moins aisé qu’il n’y paraît : quel que soit le rendez-vous, il arrive trop tard… ou plus exactement le lendemain.
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Difficile de résumer ce film, mélange abstrait entre séquences réalistes et animation dessinées au crayon de couleur. La bande-son est de Crazy horse (le morceau Crazy Horse, repassé en boucle pendant 1H35). Olaf, dans le défi du magicien, nous entraîne dans les affres de l’espace-temps. Le pouvoir de « son » magicien est extraordinaire mais aussi, malheureusement, complètement inutile, voire contre-productif. Quand il joue au loto, le tirage a déjà eu lieu et il ne gagne jamais. Il « voit » ce que chacun a fait la veille mais ne peut en tirer le moindre avantage. Pire, son pouvoir passe totalement inaperçu : « ben, alors, on t’attendait hier ». Personne ne se doute que pour lui, hier, c’est aujourd’hui.
Certains spectateurs ont du mal à suivre le scénario terriblement complexe malgré des dialogues très simples un ami le questionne : « on se voit demain ? » et Görgl répond « mais on est demain ! ».
Chaque fois qu’il essaye d’intervenir pour changer le cours du destin il apprend qu’il est néanmoins trop tard et le voilà obligé de courir pour rattraper le temps perdu.
Le fan club d’Olaf (le FCO) a prouvé, récemment, que de nombreuses images subliminales avaient été insérées dans le long métrage.
30ème minute : on discerne pendant une fraction de seconde une bouteille de Peppermint. Du sponsoring ?
42ème minute : la même bouteille mais vide.
56ème minute : un message destiné aux extra-terrestres. On peut lire distinctement : “Hello, martian ! My name is Olaf.Want a Peppermint ?”
Nous devons saluer le travail remarquable du FCO qui passe tous les films de Stromberg au ralenti, parfois à l’envers, pour ensuite émettre des hypothèses ou affirmer des vérités.
Sur http://www.FCO.org" onclick="window.open(this.href);return false; *** LE SITE N'EXISTE PLUS !!! Voir note plus bas
on apprend ainsi que la montre de Görgl affiche « réellement » un jour de décalage par rapport à celle des autres figurants. Que les vêtements de Görgl sont effectivement de la veille (à cette époque là, la mode change très vite : un jour il faut porter des Go West, le lendemain, on est ringard si on ne porte pas un jean avec des fleurs en bas et des Clark’s en daim…).
Dans la scène de la piscine, au dernier rang, derrière le plongeoir, on aperçoit Alice Cooper (et son poulet décapité) qui parle à l’envers. Il tire la langue, manière de rendre hommage à Stromberg.
Chaque année, le FCO, organise une fête nommée « le défi du magicien » et qui a lieu la veille. Fidèle au concept, ils ne l’annoncent que le lendemain et personne ne s’y rend.
Comme dans Vertigo, Stromberg a recours plusieurs fois à des scènes hypnotiques (spirales qui n’en finissent jamais, kaléidoscopes, stroboscopes, grand 8 filmé de la première cabine…)
Et l’effet fonctionne. Le spectateur doute réellement de son espace-temps. La médecine du travail évoque, depuis le film, pour certains distraits chroniques le syndrome « du magicien ».
Ultime exploit : on oublie le film aussi vite qu’on l’a vu.
La note du bas : Le site internet, pour des raisons bien compréhensibles à qui saisit les "choses" derrière le décor de l'apparence, n'est plus accessible. Il convient, comme dans de nombreux autres domaines, d'écouter celles et ceux (qui l'ont vu) vous évoquer leurs souvenirs. Ils vous parleront probablement du chien. Et de l'humain. Il reste à vous soutenir pour que la force de l'évocation soit suffisante pour les générations suivantes.
Dernière édition par peg-harty le 25 Nov 2018 12:37, édité 3 fois.
- peg-harty
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