La correction électronique
L'égalisation simple
L'insertion d'un égaliseur paramétrique ou par 1/3 d'octave, dans la chaîne de reproduction a longtemps été une solution séduisante pour supprimer les colorations. Malheureusement, cette technique pose plusieurs problèmes:
- D'abord, elle ne tient pas compte des composantes temporelles du signal. Les écarts de phase, responsables de la plupart des accidents de la courbe de réponse, ne sont pas pris en compte. Pire encore, la correction introduit des déphasages supplémentaires qui compliquent encore les choses.
- Ensuite, s'il est facile d'atténuer une crête d'amplitude, il est beaucoup moins évident de combler une atténuation. On demande à l'enceinte de délivrer une puissance phénoménale qui risque d'endommager le matériel.
- Enfin, les interférences produisent une multitude de zones de haute et de basse pression. Quand on atténue une fréquence jugée excessive en un point, on atténue également la zone de basse pression qui se trouve quelques centimètres à coté. On déplace le problème, mais on ne résout rien (voir le chapitre sur les modes stationnaires).
Exemple: mesurée en un point de la zone d'écoute, la réponse en fréquence de votre installation audio affiche un large trou de 20 décibels à 170Hz, probablement dû à un mode stationnaire. Un égaliseur acoustique fonctionne toujours en atténuation et vous découvrez qu'au 1/3 d'octave il n'existe pas de bande à 170Hz, mais seulement à 160Hz. Faute de mieux, vous laissez cette bande à son niveau nominal et vous atténuez les autres. Le niveau global devient très atténué et vous cherchez à compenser en tournant le bouton de volume. A partir de cet instant, vous risquez fort de saturer l'amplificateur car une compensation de 20dB équivaut à une élévation de la puissance par un facteur 100! Supposons que votre ampli délivre 4 watts pour une écoute confortable. Introduire une correction de 20dB équivaut à lui demander de produire 400 watts à la fréquence incriminée! Il y de grandes chances pour que l'ampli soit saturé et les enceintes détruites avant que vous n'y parveniez. Et même si c'était possible, vous auriez un niveau colossal 1 mètre plus loin, précisemment là où la correction inverse est nécessaire!
La correction par processeur numérique
Il existe aujourd'hui des systèmes de correction numérique plus sophistiqués (Digital Room Correction). Le principe consiste à prélever un échantillon des paramètres acoustiques de la pièce en mesurant la réponse impulsionnelle pour chaque canal. Les informations recueillies concernent à la fois le domaine temporel et fréquentiel. Ensuite, on applique au programme sonore, une correction équivalente à l'inverse des paramètres enregistrés. La résolution est bien meilleure qu'avec égaliseur classique car elle n'est pas limitée au tiers d'octave. La phase et le temps de propagation sont pris en compte. Ce système donne de bons résultats pour corriger les modes stationnaires et aussi pour compenser les écarts de distance entre les enceintes.
Limites de la correction électronique
Les deux méthodes ont ceci en commun: elles ne sont acceptables que pour une localisation précise. Les fabricants proposent une procédure de mesurage en plusieurs points et l'appareil calcule la correction d'après la moyenne des relevés. Cela fonctionne aux très basses fréquences, mais ne permet pas de corriger par exemple, un filtrage en peigne dont le spectre change tous les dix centimètres! A 500Hz, la distance qui sépare une crête d'une annulation est de 34cm. Deux personnes assises cote à cote n'entendrons pas la même chose.
La correction électronique est envisageable quand les longueurs d'ondes sont suffisamment importantes (jusqu'à 120/150Hz environ) et les écarts d'amplitude modestes (8 à 10dB au maximum). Elle fonctionne mieux pour une surface restreinte que pour une zone étendue.Au cours de ma carrière, j'ai eu l'occasion d'égaliser des centaines de studios d'enregistrement et d'utiliser tous les systèmes. Voici mon conseil: avant de se lancer aveuglément dans une correction électronique, explorez d'abord toutes les autres solutions. Un placement judicieux des enceintes et du point d'écoute, peut résoudre une bonne partie des problèmes. Les systèmes électroniques deviennent transparents quand on leur demande une correction modérée. Ceci suppose que les problèmes majeurs soient déjà atténués par un traitement acoustique préalable.
Source : http://www.lafontaudio.com/criteres.htm